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Je ne parle que par images... Il faut chercher le fil d'Ariane. Humm oui, le retrouver, ce n'est pas gagné. Mais enfin, bonne route ! S'il en est ... 

     

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IMAGES ALEATOIRES. LES THEMATIQUES DU LABYRINTHE...

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17 juin 2006 6 17 /06 /juin /2006 15:59

Le crâne de Fédor : voilà un lieu où se rencontrent et s'entrechoquent les deux dernières grandes idéologies du monde moderne. Pour cet article en particulier, j'aimerais assez me faire appeler Elisabeth Fédorovna, parce que F. Dostoïevski fut pour moi une sorte de père spirituel. Evidemment, dans un tel cas, le parricide est sous-jacent...  Mais avant d'en arriver là, jetons un oeil dans les tréfonds de son crâne.

Fédor, comme on le sait, fut condamné à mort pour ses activités révolutionnaires, et gracié in extrémis. Cette petite "aventure" le marquera pour le restant de sa vie. Dès lors surgiront dans sa littérature d'étranges personnages, presque caricaturaux (j'ai dit presque parce qu'ils semblent très conscients de la caricature qu'ils font d'eux mêmes), abreuvés de thèses politiques d'avant garde, déchirés par leur mysticisme, défenseurs d'un relent d'ordre moral, et finissant le plus souvent au goulag, soit fous, soit suicidés.

Les héros dostoïevskiens sont souvent des jeunes hommes aux figures christiques, mêlées d'idiotisme, de démence, voire de machiavélisme. Bref, un paradoxe.

Freud a écrit : "Dans la riche personnalité de Dostoïevski, on distingue quatre aspects : l'écrivain, le névrosé, le moraliste et le pêcheur." Mais il finira sa préface en soulignant surtout l'aspect névrotique : " L'angoisse envers le père est bien trop connue pour qu'il soit nécessaire de faire plus que la mentionner". Telle est la dernière phrase de sa préface des fréres Karamazov. Il écrira en outre dans sa correspondance privée : "Je n'aime pas réellement Dostoïevski. Cela vient de ce que ma patience envers les natures pathologiques s'épuise entièrement dans l'analyse".

Mais pour moi, plutôt qu'un cas clinique, Dostoïevski est avant tout le réceptacle d'une époque charnière, époque à laquelle les croyances sont mourantes mais non pas mortes, et où l'idéologie communiste s'ammorce tout juste. C'est le temps où se combattent à mort les derniers géants de l'aliénation humaine, avant l'avénement du nihilisme, puis du cynisme ambiant.

A présent, je ne dirais pas que rien n'a de valeur, mais que tout n'existe qu'à titre spéculatif, et donc relativiste. Qui voudrait encore mourir pour une idée ? Certes, il y a bien des fanatiques, mais le terreau dont ils jaillissent (même pour ceux qui accèdent aux jouissances matérielles) est fondé sur la négation de leurs propres valeurs*; il s'agit donc plutôt d'une attaque défensive, et non pas de la survenue d'une idéologie neuve.

Non... Vraiment, non... Il n'y a guère d'âme abyssale dans la carcasse contemporaine. Les profondeurs "dostoïevskiennes" n'ont qu'un très faible écho dans nos crânes (quoiqu'il y ait beaucoup de névrosés, mais ça n'a rien à voir).

Ce qu'il y a d'admirable chez Dostoïevski, c'est qu'il croit  à chacune des idées qui le possèdent, et qu'il croit également à la nécessité de n'y plus croire, tout en se forçant encore à croire  aux démons... dont il doute...

Ce que j'écris manque t'il de clarté ? En fait, sa dualité, c'est la volonté d'illusion contre celle du néant. Enfin, je crois...

__
______________________________________________________________________________  
*Je ne sais plus du tout ce que j'ai voulu dire par là. En fait, de quel terreau jaillissent-ils? Et de quelles valeurs est il question??? Si j'arrive à m'en souvenir, il faudra préciser.

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14 juin 2006 3 14 /06 /juin /2006 22:27

Il était une fois un jardin nommé Eden... Qui ignore cette histoire ?

Partout, à chaque époque, chacun de nous peut observer ce jardin des délices, souvent préfabriqué, parfois reconstitué, naturellement artificiel... C'est un lieu bien délimité où le mot d'ordre consiste à être heureux, innocent, satisfait (repu comme une bête, dirais-je)...


Ce jardin des délices finit toujours par virer au jardin des supplices, mais en attendant l'heure fatidique où se déchire le voile, il convient de fermer les yeux et de ruminer.

Il y a des gens qui pensent que le fruit défendu fait allusion au sexe. Mais non, pas du tout ! Rappelons qu'il s'agit de l'arbre de la connaissance (certes, le mot "connaître" au sens biblique prête à confusion... C'est à dessein, d'ailleurs,  mais revenons à notre arbre). Voilà donc le premier fruit transgressif. Ce fruit s'accorde de concert avec celui du jugement et de la conscience de soi, sans masque ni fard, dans notre entière nudité (quelle horreur !)... C'est une manière bien habile d'asservir les esprits que de brandir l'épouvantail de la culpabilité, de sorte qu'il est difficile de savoir si la trangression est une réaction saine ou perverse... Cela dépend de l'Eden en question. Certes, après avoir croqué le fruit, avide de mille et un savoirs neufs, on se trouve bien attrapé quand on apprend qu'on est tout nu, et qu'il n'y a rien d'autre à connaître (si ce n'est la maladie, la vieillesse et la mort). Ou alors, c'est précisément CELA qu'il faut connaître...


A quoi bon revenir sur cette vieille histoire ? me dira t'on. Mais l'histoire est toute jeune et n'en finit pas de passer.

Aujourd 'hui, bien sûr, le jardin a changé de nom. On s'y balade en costume et lunettes noires. Il convient d'y rêver et d'y gesticuler sur des airs de musique savamment composée. Le rêve aussi est composé sur certains petits airs. Mais le tour de force des "maîtres des lieux", c'est qu'on a même le droit de gratter le vernis de ce beau décorum, d'en critiquer l'ambiance, d'y blasphémer et de s'y battre. Délices ou sévices : c'est au choix, pourvu qu'on reste dans le cadre, et qu'on s'y sente bien enveloppé, vêtu, paré, masqué...

 Mais il demeure une limite à ne pas transgresser (sous peine d'être banni). Cette limite, c'est toujours la même : ô fruit de la connaissance !



Après avoir dit ça, il reste à définir ce qu'est cette connaissance, exactement. Non pas un amoncellement de savoirs érudits. Non pas un art dialecticien. Non pas une longue introspection de type psychanalytique... Alors quoi ? Je l'avais pourtant presque dite... Elle m'est restée sur le bout de la langue. Dommage. 

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4 juin 2006 7 04 /06 /juin /2006 20:48

S'il est vrai que l'art consiste à harmoniser les choses entre elles,  on peut dire que l'éloquence est l'art de la parole, que la musique est celui des fréquences sonores, que la représentation est celui des images, etc... Enfin, tout ça pour en conclure que la danse est l'art du geste. Du mouvement...

Plus que du geste ou du mouvement, il s'agit même de l'art de l'Acte. Pourquoi le dieu Shiva est-il représenté dansant, créant et et détruisant les sphères à chacun de ses pas ? Chacun de ses mouvements est sensé avoir d'infinies répercussions. Il y a là quelque chose qui ressemble à un rituel (où chaque geste vient méthodiquement s'encastrer dans le symbole qui lui correspond) mais aussi quelque chose qui insinue un magnétisme...  Quand je dis magnétisme, je veux parler d'une loi élémentaire : la force de gravité.

Chaque corps (terrestre, celeste ou que sais-je ?) se déplace selon son poids et va tourner autour d'un autre, lequel ira lui même graviter autour d'un astre plus grand, formant ainsi des systèmes solaires, une galaxie, des univers... N'est-ce pas ainsi à tous les niveaux ?

Et que dire des météorites qui servent de témoins aux étoiles éclatées dont les poussières viennent s'abattre sur les rondes harmonieuses des astres en ordre ? (car celui qui ne trouve pas sa place dans la ronde, s'élance dans le vide et tombe). Bref, contempler la danse des corps est toujours instructif.

Parfois, on met un peu de temps à comprendre la chorégraphie qui nous incombe. Il y a toujours une heure pour le chaos, mais tout ce qui  s'accomplit repose sur un rythme et une harmonie. C'est pourquoi (à l'instar du lapsus) un faux pas est rarement innocent.

Et le Maître du Temps doit raffoler des farandoles.

 Il est vrai que ce cher Shiva se fait aussi régulièrement piétinner par son énergique épouse, Kali. La déesse de la mort, danse aussi à sa façon... Que tourne la ronde!

 

 

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1 juin 2006 4 01 /06 /juin /2006 18:42

Des conférences ouvertes au public ont régulièrement lieu au service universitaire de l'hôpital St Anne à Paris : vaste édifice dédié aux malades de l'esprit...

Pour parvenir au lieu-dit, il faut d'abord cheminer le long des multiples allées du jardin agrémenté de petites pentes, de coins et de recoins, par delà mille carrés de pelouse verdâtre... J'exagère, dira t'on... Bref, on y entre un peu comme dans un labyrinthe. Heureusement, on en sort facilement quand on s'y aventure en tant que simple visiteur.

La conférence en question avait pour titre : "Approche psychanalytique de l'activité délirante". Je vais donc restituer les précieuses connaissances que j'ai acquises malgré mon oeil de néophyte.

Quoiqu'il y ait des formes variées de délires et bon nombre de psychoses, notre conférencier s'attarda volontier sur le cas du schizophrène. Il en fit le coeur de sa problématique, et je dois dire que jamais cas clinique ne me fut présenté avec autant de mystère. Vraiment, il en dressa un portrait digne de la plus obscure énigme des temps...

La schizophrénie, nous dit-on, n'est pas une psychose comme les autres, car le malade n'a pas accés au souvenir de l'unité originelle (c'est à dire, l'époque où le bébé crée son premier rapport au monde en s'y projetant d'une manière quelque peu narcissique). Les psychoses ordinaires amorcent généralement leur délire dans ledit narcissisme afin de se recréer un monde intérieur à partir de l'ego. Mais pas le schizophrène. Non, car le schizophrène (par un étrange oubli, un vide ou je ne sais quelle ellipse) n'a même pas d'ego. Disons plutôt que son ego a volé en éclats, de sorte qu'aucune limite claire n'existe entre lui et les autres; entre l'intérieur et l'extérieur.

Le conférencier nous rapporta ces paroles d'un patient : "Je n'ai jamais d'intimité".

Le monde entier devient pour lui un bruitage incessant, une sorte d'ennemi omniprésent qui agit jusque dans ses pensées. Or comment en est-il arrivé là ?

Notre conférencier explique que la raison se trouve dans la qualité du premier rapport au monde du nouveau né. Ce n'est pas que le rapport se serait mal passé; il ne s'agit pas là de savoir si le rapport se fit dans l'amour, la haine, la violence ou l'ambiguité.... Non, il s'agit de constater que le rapport n'a pas eu lieu.

On peut imaginer que le petit individu fut simplement traité comme un objet parmi d'autres, de la sorte la plus neutre qui soit. Ou bien, qu'il ne fut pas traité du tout. A la source de cette affaire, il y a la négation de soi même en tant que personne à part entière. Enfin, cela reste une énigme, car après tout, il y a aussi des individus ignorés ou mésestimés qui n'en deviennent pas moins de grands mégalomanes à l'égo totalitaire.

J'aurais beaucoup aimé qu'un ami (très cher) m'accompagne à cette conférence, car tout au long de ce portrait, j'avais l'impression que le psychiatre parlait de lui. Certes, le jeune homme en question n'est qu'un malade léger, mais il ressemble quand même beaucoup à cet Homme Elliptique. Vraiment, j'ignore s'il faut se laisser charmer par tant de mystère ou partir en courant.

 

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1 juin 2006 4 01 /06 /juin /2006 18:21

 
Peut-être vais je me constituer toute une collection de chansons comico-sulfureuses... Celle-ci a eu plusieurs interprètes, mais c'est sans doute Brigitte Bardot qui lui donne le plus de corps... Allons y :



 

Tu veux ou tu veux pas ?
Tu veux c'est bien, si tu veux pas tant pis

Si tu veux pas, j'en f'rai pas une maladie.
 Oui mais voilà, réponds moi Non ou bien Oui

C'est comme ci ou comme ça, ou tu veux ou tu veux pas !

La vie, oui c'est une gymnastique et c'est comme la musique
Y a du mauvais et du bon  
La vie, pour moi elle est magnifique.
Faut pas que tu te la compliques par des hésitations...


Tu veux ou tu veux pas ? Toi tu dis noir et après tu dis blanc
C'est noir c'est noir, oui mais si c'est blanc c'est blanc
C'est noir ou blanc mais ce n'est pas noir et blanc
C'est comme ci ou comme ça, ou tu veux ou tu veux pas !

La vie, elle peut être très douce à condition que tu la pousses
Dans la bonne direction
La vie, elle est là, elle nous appelle. Avec toi, elle sera belle
Si tu viens à la maison !


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30 mai 2006 2 30 /05 /mai /2006 19:49

 Ici même, nous entrons dans une zone filmique et musicale...
Ce soir, puissiez-vous (ô mes nombreux visiteurs!) goûter le doux plaisir d'une chanson veloutée; ce classique du jazz, tiré du film Gilda.
 Poster - Gilda 02

En voici les paroles, consciencieusement restituées :

PUT THE BLAME ON MAME

When they had the earthquake in San Francisco back in 1906gilda04.jpg
They said that old mother nature was up to her old tricks
That's the story that went around but here 's the real lowdown
Put the blame on mame, boys, put the blame on mame
One night she started to shim and shake
That brought on the Frisco quake
They once had a shootin' up in the Klondike when they got Dan Mc Grew
Folks were puttin' the blame on the lady known as lew
That's  the story that went around but here's the real lowdown
Put the blame on mame, boys, put the blame on mame
Mame did a dance called the Hichy-Koo
That's the thing that slew Mc Grew
So, you can put the blame on mame, boys,
put the blame on mame

 

J'ajoute maintenant à la chanson une petite critique du film Gilda qui m'a semblé s'harmoniser tout particulièrement avec l'esprit qui régne dans ce labyrinthe. L'auteur en est une certaine Ophélie... Le texte qui suit nous renverra également à l'article http://labyrinthe.over-blog.org/article-18529367.html "Dans la roulotte de Margarita Cansino" qui traine quelque part dans les méandres de ma toile... Car après tout, il ne peut pas y avoir que des projections de projections, des copies de copies, des simulacres de simulacres... Il faut bien qu'il y ait un être réel à la source. Hum, je m'égare...

Pour le texte qui suit, je crois qu'elle l'avait intitulé : Femme fatale et vilains messieurs
  
 

le triangle de gilda   
 Réalisé par un cinéaste dont le seul titre de gloire provient de la confusion courante avec son homologue, l’un des « Affiche-Gilda-1.jpggrands » du cinéma américain (King Vidor), écrit par un scénariste presque débutant, et interprété par un acteur rarement inoubliable (Glenn Ford), Gilda n’a au départ presque rien pour plaire. Est-ce la présence de la somptueuse Rita Hayworth qui bouleverse la donne ?

Rita Hayworth, à l’exemple d’une Marilyn, est une actrice « fabriquée ». Par son père d’abord, qui la força à utiliser ses charmes évidents et ses talents de danseuse pour s’introduire à Hollywood. Par ses nombreux maris ensuite, à commencer par Orson Welles, qui se servit de l’aura de son épouse pour la publicité de La Dame de Shanghai. Enfin, par le sinistre patron de la Columbia, Harry Cohn, qui la transforma physiquement en objet sexuel, objet du fantasme des soldats américains, « bombe atomique » avant l’heure. Mais Rita Hayworth, à la différence d’une Marilyn, ne sut pas utiliser cet autre « moi », cette image créée de toutes pièces que tous voulaient lui renvoyer.

Gilda est la femme fatale. Troublante d’une beauté inaccessible, mangeuse d’hommes hypnotisante, aux longues jambes interminables et à la chevelure volumineuse, on la croit sans hésiter capable des pires perversités. Gilda est un « type », celui de la femme criminelle, égoïste et arriviste du film noir. Mais le portrait se trouble très vite : à l’image traditionnelle de la femme fatale, qui se marie pour l’argent et détruit les hommes qui se prennent à son piège, Gilda répond par une sensibilité extrême, une forte superstition et une fidélité en un amour unique et idéal. Cette ressemblance troublante entre la personnalité de l’actrice et celle de son personnage (Rita est Gilda, sans aucune ambiguïté) porta tellement préjudice à Rita Hayworth qu’elle-même disait : « les hommes s’endorment avec Gilda et se réveillent, déçus, avec moi. »
GILDA-mari-amant.jpgÀ l’image de ce travail sur le rôle-titre, Gilda est un film sur le regard et les non-dits, sur la remise en question des évidences. À commencer par les sous-entendus du film, sur lesquels de nombreux critiques ont déjà beaucoup glosé. Car le titre est un leurre : Gilda n’est pas le personnage central, c’est-à-dire celui autour duquel tourne l’histoire. Elle n’apparaît d’ailleurs qu’au bout d’une vingtaine de minutes, alors que le film déroule d’abord les balbutiements d’une amitié virile, sans aucun doute homosexuelle, entre le dangereux patron d’un casino en Argentine et un petit malfrat (Johnny, le nom de tous les gangsters) devenu l’employé et le confident de cet homme mystérieux. Les symboles sont d’une limpidité étonnante : on relèvera, entre autres, l’épée que sort le patron de sa canne, considérée comme « un » ou « une » troisième ami(e) (l’interrogation est troublante) ou la jalousie maladive de Johnny Farrell vis-à-vis de la nouvelle femme de son patron, la somptueuse Gilda.


Entre ces deux hommes, dont elle constitue pourtant le principal sujet de conversation, la femme n’a aucune place. Son pouvoir sexuel est sans cesse remis en cause, tout en étant particulièrement appuyé : vêtue ou quasiment dévêtue des tenues les plus provocantes (on pense à la scène du strip-tease sur la chanson « Put the Blame on Gilda-fumant.jpgMame »), Gilda ne provoque qu’un désir fictif chez les hommes qui l’environnent. On l’admire sans trop oser la toucher, et aucun de ses deux maris ne consomme véritablement le mariage. Trop belle, trop sincère, Gilda est emprisonnée dans le rôle qu’elle s’est donnée malgré elle, à la fois constamment entourée et éternellement seule.


L’intérêt principal de Gilda se joue donc sur cet apparent paradoxe : suggérant presque trop (on peut reprocher à Gilda de nombreuses facilités scénaristiques et quelques longueurs), Charles Vidor refuse pourtant de lever les principales ambiguïtés de l’histoire. D’où viennent les personnages ? Qui sont-ils ? Que se trame-t-il réellement dans ce casino sinistre ? Peut-on croire vraiment au happy-end réunissant Gilda et Johnny alors que le sentiment d’amour ressenti par les personnages est à plusieurs reprises comparé à de la haine ? La mise en scène est à peine explicative : Vidor s’amuse d’un jeu sur l’ombre dans lequel il plonge ses personnages, qu’il filme souvent de dos, comme pour les rendre encore plus flous. De même sur les regards : Gilda est un film où l’on observe beaucoup, où l’on se surveille constamment (on pense aux stores des bureaux au-dessus du casino, qui s’ouvrent et se ferment), mais sans jamais réellement comprendre ce que l’on voit. Dans ce film trop noir, seule la femme, pure même dans ses pires vices, peut être source de lumière.
 
Ophélie Wiel.

 



   

 

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7 avril 2006 5 07 /04 /avril /2006 19:09

Me voilà donc aux prises avec les affres de la page blanche...Aujourd'hui, les indices de mon propre chemin consisteront en trois mots : MICROCOSME, PASSERELLE ET VERTIGE.

Note rapide : Errance X n'a évidemment rien à voir avec du cul. Désolée.

Je vais quand même prendre la peine d'illustrer cette sensation. Pour savoir ce qu'est l'Errance X, il faut avoir pénétré dans le royaume de l'Oubli. Alors, voici un conte de fée, vraiment très très ancien, qui n'en finit pas de passer.

*************************************************************************
 
 Il
était une fois
un royaume merveilleux par delà les mers. Un royaume dont personne ne connaissait le chemin, et dont les habitants pouvaient perdre la trace dès lors qu'ils en sortaient...
  Or, un jeune homme quitta ce royaume, par un beau matin chaud. Il partit avec insouciance, tout nu sous le soleil. Il marcha tout le jour, admirant les paysages qui défilaient sur son chemin, comme la faune et la flore. Bientôt, il arriva devant une chose étrange qui le fit s'arrêter net. Il n'avait jamais rien vu de plus gigentesque ni de plus imposant. Il s'agissait des portes d'acier d'une haute forteresse. Malgré sa stupeur, le jeune homme fut pris de curiosité. Il s'avança vers les portes massives avec l'intention d'y frapper, mais celles-ci s'ouvrirent d'elles mêmes devant lui. Dès qu'il eut pénétré à l'intérieur de la cité, il se retrouva face au gardien : véritable géant couvert de métal dont les yeux rouges le dévisagèrent.

- D'où viens tu comme ça, jeune fou ? demanda le gardien. Tu dois avoir bien froid et être bien faible... Je ne sais même pas comment tu as pu te traîner jusqu'ici... Dis moi, de quelle catastrophe as-tu été la victime ?

- Je ne suis pas une victime, répondit le garçon. Il n'y a pas eu de catastrophe. Je n'ai pas froid et je ne me sens pas faible non plus... Je viens de... Je...

Mais tout en disant ces mots, il sentit qu'il ne savait plus ce qu'il voulait dire, ni même d'où il venait. Une angoisse nouvelle l'envahit subitement. Il se sentit ridicule dans sa nudité, et bientôt, il eut froid. 

- Je ne sais plus ce qui s'est passé, admit le jeune homme. Je crois que je vais me sentir mal...

Le gardien emmena le garçon dans son appartement privé et lui donna des vêtements qui semblaient être d'aluminium. Puis, il  posa la main sur sa tête et lui parla avec gravité.

- Tu ne peux pas rester ainsi, mon enfant. Toute cette chair est répugnante. Un rien peut te blesser. Sache que nous autres, nous ne saignons pas. Regarde mes bras. Il y a des armes incorporées dans chaque doigt. Mes yeux possèdent des radars. Mes jambes sont de véritables fusées capables de me propulser à plusieurs kilomètres dans l'atmosphère. Je suis à moi même mon propre véhicule, et nous sommes tous ainsi. Pourtant, je ne suis qu'un simple gardien. Il y en a d'autres parmi nous, encore bien plus évolués... Ecoute moi attentivement, et tu pourras devenir comme nous. Tu travailleras pour moi, et petit à petit, je te ferai acquérir un nouveau corps indestructible. Je ne veux que ton bien,  mon petit.

Le jeune homme avait tellement honte d'être si frèle et vulnérable face à ce géant d'acier, qu'il accepta immédiatement avec une profonde gratitude. Dès le lendemain, il commença son travail d'homme à tout faire auprès du gardien de la forteresse. Il apprit le nom de chaque citoyen, chacune de leur fonction et de leur particularité. Il les regardait avec envie et attendait impatiemment le jour où il serait comme eux.

Au bout de quelques mois, le gardien appela le jeune homme pour lui montrer son premier gage. Il s'agissait d'un bras d'acier, rempli d'accessoires et d'armes perfectionnées.

- Lorsque tu auras ce bras, les gens commenceront à te respecter, dit le géant. Ce n'est qu'un début, certes, mais nous y arriverons progressivement. Et tu seras bientôt un homme à part entière. Nous procéderons demain à la première opération.

- Opération ? répéta le jeune homme. On va donc m'opérer ?

- N'aie pas peur, dit le gardien. Il faut bien que nous te débarrassions de cette horrible chair, juste afin de la remplacer par une petite merveille de technologie.

- Vous voulez me couper le bras ! s'écria le garçon.

- C'est ainsi. C'est la procédure. Tu ne perdras pas au change, alors calme toi.

Le jeune homme se laissa convaincre par le gardien qui lui accorda cependant trois jours de réflexion avant la première opération.

Pendant la nuit suivante, le jeune homme fut tourmenté par les doutes. Quelque chose lui disait que son petit corps d'athlète n'était pas si honteux que ça, mais il ressentait un tel mépris de la part de son entourage qu'il finissait pas ne plus savoir que croire. Or, au cours de cette même nuit, il y eut une petite explosion dans la salle de contrôle, et les appartements du gardien furent plongés dans l'obscurité. Une voix rauque et maladive raisonna alors dans la nuit, et la garçon se dirigea vers le lieu d'où elle provenait. En entrant dans la pièce, il vit le gardien étendu au sol, en fort mauvaise posture.

- Ouvre cette armoire, là bas contre le mur, murmura le gardien, et rapporte moi les choses que tu y trouveras.

Le jeune homme y trouva quatre membres d'un autre métal que ses membres habituels. Il les souleva tant bien que mal et les plaça devant son maître.

- Aide moi, dit le gardien. Il y a eu une petite surchauffe. Rien de grave. Mais il faut que je retire ceux que je porte. Il faut appuyer ici et tirer. Vas y.

Le jeune homme suivit les instructions du gardien. Mais lorsqu'il vit son corps sans membre, il fut soudain frappé de son infirmité. Il se rendit également compte que tout son savoir était contenu dans une petite puce electronique qui le plongeait dans l'abrutissement toutes les fois qu'il fallait la remplacer. Cette image lui fit une telle impression d'horreur qu'il résolut de quitter la forteresse à l'instant même.

Tandis que le gardien se remettait debout, le jeune homme annonça son départ.

- Ne fais pas l'imbécile! s'écria le géant lorsqu'il eut retrouvé son assurance et ses armes. Tu vas sombrer, dehors. Il n'y a rien en dehors de cette forteresse! Que crois-tu ? M'avoir démasqué ? Mais je suis fort, je suis puissant, et tu n'es rien! Accepte ce que je te donne, car personne d'autre ne t'aidera. Si tu t'en vas d'ici, tu vas pourrir comme une charogne, et tu vas le sentir. Et tu vas regretter!

Mais le garçon était déjà loin. Il passa les portes de la forteresse et disparut dans le brouillard. Au début, il sentit tout le poids de la peur, du froid, et de l'angoisse, mais au fur et à mesure, il se souvint de quelque chose. Il marcha seul, assez longtemps. Et petit à petit, il retrouva un chemin familier. C'est alors qu'il retrouva aussi la mémoire de ce qu'il était, et la trace du royaume d'où il était venu.

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10 mars 2006 5 10 /03 /mars /2006 22:25

antechristnietsche Voici quelques réflexions et extraits issus du livre L'Antéchrist, par Frédéric Nietzsche.

 Il est sûrement trop difficile de se représenter le degré d'hypocrisie qui règnait dans la société crépusculaire qu'est la fin du dix neuvième siècle, mais compte tenu de la rage de Nietzsche pour défendre son fameux instinct de puissance, on peut s'en faire une petite idée.

Notre grand philosophe a mis un point d'honneur à replacer l'homme au niveau de ses instincts les plus basiques (et même, les plus féroces). Car  s'il y a quelque chose de pire qu'un homme rabaissé au rang de bête : c'est lorsqu'une bête se déguise en homme. Nietzsche (qui prétendait avancer masqué) n'a jamais cessé de faire sauter les masques et d'arracher les déguisements.

Il me semble qu'il a mis à nu ses propres instincts sans fard ni pincettes, poussé l'homme à une totale intégrité, une pleine conscience de ses désirs et de ses valeurs réelles. Il a surtout voulu le dégager des influences culpabilisantes du temps, et en premier lieu, du christianisme. J'ignore comment il en est venu à s'écrier : "Le parasitisme ! seule et unique pratique de l'Eglise, avec son idéal d'anémie, son idéal de sainteté buvant à l'épuiser tout sang, tout amour, tout espoir dans la vie ; l'au delà en tant que volonté de négation de toute réalité ; la croix comme emblème pour la plus souterraine des conjurations qui aient existé : contre la santé, la beauté, la qualité, la bravoure, l'esprit, la bonté de l'âme, contre la vie elle même".

J'ai remarqué que ce sont toujours les plus chrétiens qui se dégoûtent le plus violemment de cette religion (car Nietzsche se destina d'abord à la théologie, mais renonca finalement à devenir pasteur)... C'est encore l'hypocrisie, je suppose, qui aura mis Nietzsche en fureur.  On dirait qu'il a dû arracher les évangiles de sa moelle (cette opinion n'engage que moi).

Enfin bref, voici un  autre petit échantillon de l'Antéchrist, livre dont certains développements donneront matière à une sanglante idéologie :

"L'évolution que représente l'humanité n'est pas un progrès vers quelque chose de meilleur ou de plus fort... L'Européen d'aujourd'hui, quant à sa valeur, reste bien en dessous de l'Européen de la Renaissance... Sous un autre rapport, il existe une réussite constante des cas isolés, aux endroits les plus divers et provenant des cultures les plus diverses avec lesquels se manifeste effectivement un type supérieur : quelque chose qui par rapport à l'ensemble de l'humanité est une sorte de surhomme".Friedrich-Nietzsche.jpg

Le vingtième siècle a vu ce que ce genre d'exhortations a donné sur le terrain, massivement inoculé à des esprits sans finesse. Il y a tant de chiens enragés qui feraient mieux de cultiver l'Homme qui sommeille en eux, qu'il est toujours trop tôt pour penser au surhomme...

Enfin bon, le conflit d'interprétation est inévitable. Que voulait donc dire Nietzsche ? Que l'homme doit assumer et explorer sans crainte ses instincts les plus dangereux ?

Or, après s'être immergé au coeur de l'instinct animal, il faut encore passer par le règne végétal (la réceptivité originelle). Et après ça, il faut descendre plus bas que terre, sous le poids indicible de l'instinct minéral (si ! si ! il y a également un instinct minéral, proche de la force d'inertie, et bien ancré en nous).

Puis, ayant parcouru toutes les composantes de sa nature, l'être humain devrait pouvoir choisir en connaissance de cause ce qu'il est vraiment. Ou du moins, il devrait pouvoir déceler cette petite place vide, cette zone manquante, cette question sans réponse à laquelle il doit pallier par lui même, ce en achevant de se créer à l'image qu'il aura intimement choisie.

 

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10 mars 2006 5 10 /03 /mars /2006 20:36

Après avoir beaucoup tergiverser, badiner et thésoriser sur la nature de l'homme, la société nous ramène presque toujours à une loi toute simple (cette bonne vieille constante) : j'ai nommé la loi de la jungle. 

Après ça, il n'y a plus qu'à trouver à quel animal s'identifier. Parfois, pour se rendre compte de l'espèce de notre prochain, il suffit d'observer ses stratégies de chasse. Ainsi, le renard cherche des pigeons, le loup guette les moutons (de préférence en bons troupeaux  - le gibier des forêts étant une proie bien trop agile), la hyène raffole des bêtes blessées et autres moribonds, le vautour s'abat sur les cadavres, la cigale chante, la fourmi oeuvre, etc...

Et lorsque nous avons enfin décidé de notre rôle dans cette ménagerie, nous voilà étiqueté, pesé, emballé et fin prêt pour l'office.

Je me demande pourquoi Nietzsche a choisi la formule "Humain, trop humain". C'est d'autant plus étrange qu'il avait su relever, avec une acuité hors du commun, cet instinct animal (la fameuse volonté de puissance) à la base des religions et des systèmes de pensées, qu'ils soient moralistes, politiques ou esthétiques. On aurait plutôt envie de dire : "Humain, guère humain".

Nietzsche avait choisi l'aigle et le serpent pour emblème. Le symbole en dit long. Le charognard (que peut être l'aigle, si royal soit-il) semble ici destiné à dévorer l'antique connaissance sur laquelle reposait des dogmes obsolètes.

Bref, tandis que nous gesticulons au carnaval, parés de nos masques de chats ou de chauve souris, il y a peut être encore des hommes qui choisissent d'être des hommes.

Oui oui, voilà une parole bien naïve, mais il me semble que l'être humain est capable d'autre chose que d'obéir aux lois de la jungle.

Certes, ce n'est pas toujours au ciel qu'il faut chercher cette autre chose, sinon nous n'aurions plus qu'à chantonner à l'instar d'Alain Souchon : "Et si en plus, il n'y a personne ?"

Non, pas la peine d'aller chercher si loin, ni si haut. L'humain se forge lui même. A lui d'être exigeant et de prendre ses responsabilités afin de devenir autre chose qu'un insecte nuisible de plus à la surface du globe.

 

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1 mars 2006 3 01 /03 /mars /2006 20:42

L'aventure remonte à janvier 2006. J'ai coutume d'errer à travers les dédales de l'existence et souvent je m'égare, même à côté de chez moi... Mais ce jour là, j'avais prévu d'assister à une conférence sur les volcans, sans qu'il y ait dans cet élan la moindre contingence.

 -  Pourquoi ça ? me dira t'on.

Eh bien,  je voulais récolter un peu de documentation pour un simple conte de fées (dans lequel devait figurer un monarque des magmas). L'explication semblera légère, mais après tout, il m'en faut peu, et je disposais alors d'une grande liberté de temps et de mouvement.

La conférence en question devait avoir lieu à l'Académie des sciences, ou peut être devrais je dire l'Institut de France. L'édifice se trouve en face du Palais royal. Il y a là quelque chose de solennel et d'écrasant. Je n'y étais jamais venue et je dois dire que l'endroit repousse de lui même les profanes par son aspect austère et ses mines hiératiques.

Bien entendu, je m'y perdis. Bien entendu, je trouvai là matière à mon errance. Bien entendu, l'endroit se mua pour moi en authentique labyrinthe... Il y avait une cour pavée et divers bâtiments. J'empruntai un large escalier extérieur, au hasard, et je me retrouvai dans une grande salle entièrement désertée. Le décorum avait de la magnificence. Un petit escalier sur le côté menait à une sorte d'antichambre pleine de portemanteaux. Enfin bref, il n'y avait pas la moindre trace de conférence, ni d'ailleurs âmes qui vivent. Je fus, du reste, assez surprise qu'on puisse y entrer comme dans un moulin, surtout quand on connait le dispositif de sécurité qui se trouve (par exemple) à l'entrée du centre Pompidou. Mais poursuivons notre chemin...

Je fis donc marche arrière avant de m'orienter vers le bâtiment d'en face : une bibliothéque, ce me semble. Les mêmes dédales déserts se présentèrent à ma vue. J'empruntai un nouvel escalier montant et j'arrivai bientôt devant un petit bureau étonnamment ornée d'une créature humaine. C'est à dire qu'à ma grande surprise, quelqu'un y était assis : une femme qui leva les yeux sur moi et à laquelle je demandai où était la grande salle des conférences.

 -  Je n'en sais rien, répondit elle, mais ce n'est pas ici. Vous devriez demander à l'accueil.

L'accueil ? Y avait il donc un accueil ? Avais je vu un accueil avant de m'engager dans ces hauts bâtiments ? Certes, j'étais d'abord passée devant une sorte de cabine de garde frontière avec un barrage pour les véhicules, mais je n'avais nullement identifié cet individu comme exerçant une fonction de nature hospitlalière. Enfin bon, j'en avais préjugé. Je retournai donc sur mes pas et je demandai à cet homme où était la salle de conférence.

 -  Il faut passer sous la voute, dit il. Ce sera la première porte sur votre gauche, au deuxième étage.

La chose était donc impossible à deviner... Je note l'information pour ceux qui voudraient voir par eux mêmes car (quoique le lieu soit ouvert) le public ne s'y aventure pas tellement. Comme je l'ai dit plus haut, il y a là une ambiance qui maintient la plèbe à distance "respectueuse".

Il y avait déjà un quart d'heure que je tournais en rond lorsque je pénétrai enfin dans le bon bâtiment. En bas, je vis des grooms en livrée verte. Dorures, escaliers tapissés... Je me rendis au deuxième étage. Boiseries, statues de marbre... Avant d'entrer dans cette fameuse salle de conférence, je vis trois femmes faisant signer de petites fiches aux arrivants, debout derrière une simple table. Elles me confirmèrent que ladite conférence était ouverte au public. Chose étrange... J'entre. Je vois une place libre au beau milieu de la pièce. Je m'assieds, puis j'observe. La salle était pleine d'individus austères et grisonnants. Il y avait un micro devant moi, et à quelques mètres sur ma gauche, j'aperçus la tête d'un ancien ministre de l'Education Nationale (un certain Claude Allègre). Ce n'est qu'alors que je me demandai si telle était bien ma place.

 -  Ne suis je pas assise dans le fauteuil de quelqu'un d'autre ? demandai je à mon voisin de droite.

L'homme parut un brin surpris de mon apparition (il est vrai que mon aspect détonnait quelque peu avec le reste de l'assemblée, et puis j'étais vêtue de rouge).

 -  En général, le public se place plutôt contre le mur, répondit l'individu. Mais les places ne sont pas réservées, alors faîtes donc.

Puis après trente secondes, il lui vint à l'esprit de rajouter une note d'humour.

 -  En fait, reprit l'homme, vous vous êtes installée à la place d'un ancien ministre qui n'aurait cédé ce siège pour rien au monde, mais puisqu'il vient de mourir...

Sur ce, l'homme éclata de rire, de concert avec au autre individu un peu plus gras. Voilà pour mon entrée en ces lieux. A présent, je m'intéresserai à la nature de la conférence.

Le ton de l'exposé n'était pas à la vulgarisation des connaissances mais plutôt à la querelle entre écoles. Il s'agissait de défendre une thèse contre une autre et, si j'ai bien compris, ces messieurs semblaient s'opposer à la théorie de l'impact. Faisons un bref résumé de ce que j'en ai retenu : Il est couramment enseigné que la disparition massive de certaines espèces (celle des dinosaures en particulier) serait dûe à l'impact d'une météorite. Les cratères identifiés font d'ailleurs figure de preuve. Mais pour les conférenciers ici présents, il s'agissait de mettre en évidence un autre phénomène, celui d'irruptions volcaniques ayant déjà régulièrement éclaté sur le globe, quoique à un rythme fort espacé (des dizaines de millénaires, voire peut être des centaines). Ce phénomène était présenté sous le nom de "trappes" (l'hortographe est sans doute incorrecte, mais je n'ai pas pu retrouver ce terme dans mon encyclopédie).

Au delà de ces considérations, il me sembla que les conférenciers s'appliquaient à souligner l'aspect naturel de la chose. Bientôt, la conférence en vint à s'attarder dans le domaine de la climatologie. Les questions furent alors : A t'on vraiment les moyens de mesurer le réchauffement climatique de la planète ? N'est ce pas une simple hypothèse ? Une légende ?

A nouveau, ces messieurs soulignèrent le caractère "naturel" des catastrophes et des bouleversements géologiques, qu'il s'agisse de la fréquence des tornades, des canicules ou que sais je ? Comme il y avait dans tout cela une imperceptible tendance à décharger l'action de l'Homme de son "impact" sur l'environnement, de tels propos ne tardèrent pas à exciter la polémique. Les petits micros disposés sur nos tables constituaient par eux mêmes une invitation au dialogue, mais précisons au passage que les noms et les questions des intervenants étaient déjà inscrits sur les fiches de nos chers conférenciers. Dans ce monde des hauteurs (ou faut il dire Elite ?) les gens commencent par se faire des politesses avant de se lancer des piques. Les mielleuses insultes qui fusèrent courtoisement dans la salle, mirent principalement l'accent sur le carctère éphémère des théories en la matière, puisqu'un nouvel élément venait régulièrement détruire telle ou telle thèse dans les deux ans qui lui faisaient suite. Enfin, mon but n'est pas ici de retracer l'exact déroulement du débat. La chose se fit à la mode parisienne, c'est à dire, sur le ton de l'opposition. On se cherche querelle. On ricanne quand un autre déclame. On se fait des courbettes et des croche-pattes. Il y a là quelques ressemblances avec le style de l'Assemblée Nationale (les personnages semblent rétroactifs).

Quoi qu'il en soit, la Science montra un visage fragmenté en diverses spécificités, certes pointues mais fatalement enclines à la cacophonie...

A un certain moment, un homme posa une question sur l'apparition des plantes à fleur. Il demanda s'il était possible d'établir une corrélation entre la disparition massive de certains végétaux, le renouvellement des espèces et l'apparition spécifique des fleurs. J'ignorais pour ma part que les fleurs  aient été tardives dans le règne végétal, mais après tout, je ne suis pas une spécialiste. Quant au conférencier, il usa de termes choisis pour répondre à cette question, mais en gros, ses mots furent : Je l'ignore.

Oui ,ceci est un labyrinthe ! Labyrinthe des codes, des idées et du langage. Voilà donc l'impression que me laissa cette conférence. Certes, elle posa des questions et ouvrit bien des voies tentaculaires, mais de réponses, elle n'en apporta guère (en tout cas, pas à moi).

Montrer qu'on maîtrise son sujet, même lorsqu'il est sans fond, tel est le tour de force de ces grands orateurs. La séance s'acheva sous les applaudissements, et je dois dire que c'est tout un art que d'avoir l'air sûr de soi, solide et éclairé, alors qu'on danse sur un volcan.

 

 

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