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25 avril 2009 6 25 /04 /avril /2009 16:31

 
J'inaugure ici une nouvelle catégorie, celle des dossiers personnels... J'évoque par là mes sujets d'études, mes contes, mes pièces, mes méthodologies, etc... Pourquoi commencer par un sujet de théologie ? Humm... Hé bien parce qu'il est difficile d'analyser la génèse commentée par un homme qui pensait que la Terre était plate et que le soleil tournait autour comme un petit luminaire. La science était toute autre à cette époque (encore antérieure au moyen âge !). Mais il est possible de réstituer une pensée sans la dénaturer ni la tourner en dérision, en s'attachant à l'essentiel, sans se laisser effrayer par l'aspect putrescible des choses... C'est à dire, la part qui meurt dans les formes de l'esprit.

Sinon, pour ceux qui ne le sauraient pas, le terme hexaëmeron renvoie aux six jours de la création. Et le texte qui suit est le commentaire d'un commentaire, l'analyse d'une analyse. Bref, une chose dépourvue de légèreté.


 


 

 

 Sujet de théologie dogmatique :


 

                         L’HEXAËMERON DE SAINT BASILE 

                                                  
 

 

 

 

  

INTRODUCTION

 


  
Les neuf homélies prononcées par Saint Basile empruntent des formes si variées qu’il semble exclu d’en faire l’analyse littérale, quelle que soit la simplicité revendiquée par leur auteur. Il s’agit, au contraire, d’une exégèse fort complexe qui survole un grand nombre de domaines et de disciplines dont il est malaisé de saisir l’unité. Or, c’est le principe d’unité qui constitue malgré tout la clé de voûte de cet hexaëméron.
Saint Basile pose l’éveil et l’émerveillement comme conditions d’accès à la compréhension de l’univers, de l’ordre du monde et de la volonté divine. Néanmoins son discours est chargé de démonstrations, de déductions et d’illustrations qui peuvent le rendre confus à la lumière d’aujourd’hui. La volonté de fournir des preuves au mystère et de lui définir un cadre, se trouve parfois en contradiction avec la disponibilité de conscience ou la simplicité intuitive qu’il prône par ailleurs. Mais Saint Basile distingue plusieurs niveaux de conscience dans l’esprit humain, et c’est sans doute pourquoi il varie les codes de communication.

Dès la première homélie, ce monde est comparé à une école où l’esprit peut s’instruire. En cela, la perception sensible et la rationalité ne sont pas exclues de son discours en faveur de la foi, mais constituent plutôt des strates sur le chemin de la connaissance. La création apparaît à la fois comme un miroir où se réfléchit la condition humaine (via une nature intelligible, pleine de signes anthropomorphes) et comme une matière pétrie par un ouvrier suprême  il est toujours possible de relever des empreintes et de décrypter un sens.

Outre  le « décryptage » que se propose Saint Basile, cet héxaëméron donne une nouvelle orientation à la sacralité. C’est là un point délicat, car il correspond à la désacralisation de la nature en tant que telle. A ce sujet, on peut regretter que la dimension utilitaire de la nature ait pris le pas sur sa dimension interrelationnelle, après qu’elle ait été dépouillée de ses dieux archaïques. Les notions de Dieu latent, de Trinité et de puissances invisibles n’étant pas les plus accessibles à l’entendement, on peut comprendre que certaines subtilités aient donné lieu à certaines confusions. Ainsi, l’héxaëméron de Saint Basile exalte un univers traversé par l’élan créateur, appelé à la transfiguration, sans nulle dualité entre esprit et matière, mais il contient aussi des éléments qui peuvent y induire une scission.

La difficulté de ce texte réside dans sa simplicité délibérée quant à des sujets hautement complexes. Bien des éléments de ce discours apparaissent aujourd’hui désuets dans leur forme, mais une vision approfondie nous donne à voir un véritable principe de cohésion, d’interpénétration et d’unité dans l’ordre de la vie.

 

 

  

I.                   L’INVISBLE DANS LA CREATION

 

     

  Au commencement de son exégèse, Saint Basile évoque des œuvres antérieures à ce monde : une constitution spirituelle « convenable à des puissances célestes »  que l’Ecriture aurait supprimée dans son récit parce qu’ « il ne convient pas d’en parler à des hommes qu’on instruit encore, et qui sont enfants pour les connaissances » (Homélie 1). Cette allusion sous- entend plusieurs niveaux de conscience, et donne un aspect relatif à l’entendement humain. Du même coup, l’allusion nous renvoie à des zones elliptiques où toute interprétation demeure en deçà d’une Vérité immuable, et s’apparente davantage à une initiation qu’à l’acquisition de cette vérité.

Lorsque Saint Basile dit : « Si par des objets visibles, vous vous êtes élevé jusqu’à l’invisible, alors vous êtes un auditeur bien préparé. » (Homélie 6), il n’oppose pas ces deux notions, mais semble leur attribuer le pouvoir de se révéler l’une par l’autre. Il n’y a donc pas de séparation nette entre le spirituel et le matériel, mais plutôt relation et interpénétration. Ces éléments constituent de véritables clés de lecture.

Dans la suite de ses homélies, Saint Basile prend des positions plus délicates, aujourd’hui difficiles à soutenir, notamment lorsqu’il revendique une interprétation littérale : « Pour moi, quand je lis herbe, j’entends herbe (…) je prends tout cela comme il est écrit car je ne rougis  pas de l’évangile (…) que les choses soient donc entendues comme elles sont écrites. » (Homélie 9). Sans doute ce positionnement était-il opportun dans son contexte, lorsqu’il était nécessaire de garantir un cadre de transmission aux écritures ; mais puisque les mots demeurent toujours en dessous de ce qu’ils tentent d’exprimer,  notre présente analyse risque de faire violence à cette position.

 

Bien que Saint Basile apparaisse instruit et curieux des sciences de son temps, il les qualifie régulièrement de sciences vaines, de folles sagesses, de rêveries, ou encore de laborieuses bagatelles. Il en emprunte toutefois certains codes lorsqu’il se lance dans l’exploration des mille et un domaines de la création. Tour à tour géographe, biologiste, herboriste, astronome, logicien, chimiste ou océanologue, Saint Basile ne méprise aucun terrain. Certes, ce qui lui importe, ce ne sont jamais les disciplines en elles-mêmes, mais leur inscription dans le projet divin et la mise en relief d’un ordre harmonieux.

Tout au long de ses homélies, il ne cesse de s’émerveiller de la diversité et de la beauté des œuvres de Dieu. Tout évoque sa présence, et chaque objet porte la marque du créateur. Par delà les sciences et les raisonnements, Saint Basile met l’accent sur la simplicité d’un esprit pur et attentif aux mystères de cette présence.

Or, la simplicité côtoie la difficulté de très près… Lorsque Saint Basile parle de la création de la lumière « non par le cours du soleil, mais par l’effusion de la lumière primitive » (Homélie 2), il pose la question du Temps. Cette création correspond au premier jour, avant même la naissance des astres. Et ce premier jour correspond lui-même à un jour éternel « car ce qui offre le caractère d’une chose unique et incommunicable a été appelé proprement et justement le Jour (…) afin que par ce nom, il ait du rapport avec l’Eternité. » (Homélie 2).

Quant au soleil, dont la création est postérieure à celle des premiers germes, il est délibérément placé au rang de simple véhicule « afin, dit Saint Basile, que les hommes cessent d’adorer cet astre comme l’auteur des productions qui conservent notre vie » (Homélie 5 et 6).

Il y a là une volonté de mettre l’invisible au premier plan, de l’amener à transparaître et à transfigurer les objets matériels vers lesquels nous portons d’ordinaire nos désirs ou notre admiration. A la lecture de cet hexaëmeron, tout nous pousse à voir le divin à travers le moindre élément, sans frontière véritable entre un monde terrestre et céleste, mais il existe néanmoins des formes et des fonctions symboliques que l’auteur n’intègre pas dans l’ordre universel.

 

Au début de la quatrième homélie, Saint Basile s’emploie à détourner les hommes de leurs préoccupations charnelles, des spectacles et des artifices du monde. En  fait, il semblerait qu’il combatte les projections imaginaires et les représentations humaines. C’est probablement là que survient la scission, car Saint Basile ne semble pas attribuer à la fonction fabulatrice un rôle déterminé dans le projet divin. Notons que son époque correspond à l’ultime tentative de la pensée antique et des divinités païennes pour reprendre le pouvoir, sous le bref règne de Julien l’Apostat. Il est étrange de constater que ce jeune empereur qualifiait les chrétiens d’impies galiléens et qu’il les accusait d’athéisme. Ainsi, l’universalité des dogmes chrétiens a pu paraître vide, ou tout du moins hermétique. Or, l’intransigeance du dogme face aux différentes perceptions de l’Invisible dans la création semble elle-même générer des dualités indirectes. Les imageries, les opinions et les interprétations profanes y apparaissent véritablement comme des ennemies à combattre.

C’est certes par volonté de simplicité et d’accessibilité que l’auteur reste au plus proche d’une lecture littérale, même s’il se risque à sous-entendre plusieurs degrés de consciences. Saint Basile a déjà évoqué une sorte de parcours initiatique de l’esprit (voire, une propédeutique) dans la première homélie, mais il ne fait que l’esquisser sans la pousser trop loin, et revient toujours aux préceptes de la révélation : « Nous nous proposons d’examiner le bel ordre de l’univers et de contempler le monde, non d’après les principes de la sagesse du siècle, mais d’après les instructions que Dieu à données à Moïse » (Homélie 6). Quoique Saint Basile se réfère prudemment aux textes plutôt qu’à ses intuitions, les uns entrent forcément en collision avec les autres… 

  

Dans le même ordre d’idée, le psychanalyste C. G. Jung écrit : « Les phénomènes religieux sont des phénomènes vitaux et non des opinions. Lorsque l’Eglise persévère durant des siècles dans l’idée que c’est le soleil qui tourne autour de la terre, pour n’abandonner ce point de vue qu’au XIXe siècle, elle peut s’appuyer sur la vérité psychologique que pour des millions d’hommes précisément le soleil tournait autour de la terre (…) Malheureusement, il n’y a pas de vérité s’il n’y a pas d’homme pour la comprendre ». (L’Âme et la Vie).

Le philosophe H. Bergson distingue, quant à lui, deux sortes de religions qui tendent à la dissociation : une religion naturelle et statique à fonction conservatrice, et une religion dynamique, mystique, véritablement surnaturelle. Il écrit : « En le définissant par sa relation à l’élan vital, nous avons implicitement admis que le vrai mysticisme était rare (…) Si tous les hommes pouvaient monter aussi haut, ce n’est pas à l’espèce humaine que la nature se fût arrêtée, car celui-là (le vrai mystique) est en réalité plus qu’un homme ». (Les deux sources de la morale et de la religion).

La position de Saint Basile semble balancer entre ces deux notions (statique et dynamique) : ouvrir un chemin d’élévation tout en délimitant un cadre. On peut se demander dans quelle mesure la foi chrétienne s’est elle-même embourbée dans les projections et les représentations qu’elle combat. Quant à l’avènement de l’invisible au cœur du visible, il s’avère parfois très superficiel. A ce sujet, C. G. Jung avait un discours pessimiste : « La civilisation chrétienne s’est révélée creuse à un degré terrifiant : elle n’est que pur vernis, si bien que l’homme intérieur n’en a pas été touché. L’état de son âme ne correspond pas à la croyance professée (…). Extérieurement tout est là, en images et en mots, dans l’Eglise et dans la Bible, mais à l’intérieur ce sont les dieux archaïques qui règnent plus que jamais. » (L’Âme et le Vie).

 

La  dimension de l’Esprit Saint semble indispensable pour comprendre l’action de Dieu sur sa création. Or, cette dimension ne s’appréhende consciemment que dans l’âme humaine. A la fin de son exégèse, Saint Basile montre quelque embarras à définir le statut de l’homme : « Il semble réellement très difficile de se connaître soi-même. L’œil qui voit hors de lui ne se sert pas pour lui-même de sa force intuitive » (Homélie 9). Ainsi l’hexaëmeron ne traite pas directement de la création de l’homme ; mais quoique cette question soit laissée en suspens, son reflet est omniprésent dans chacune des œuvres qui le précèdent.

 

 
 

II.                UN POINT DE VUE ANTRHROPOMORPHE

 

 


 
Après que les eaux se soient divisées et que la terre ait reçu l’ordre de produire, une âme vivante advient. Saint Basile évoque alors la condition humaine dans le cours même de la nature. Chaque créature recèle une vertu et croît vers son accomplissement. Or, cet accomplissement n’est pas un automatisme et peut aussi bien ne pas advenir. L’accomplissement dont il s’agit est d’abord celui de l’homme, auquel Saint Basile confère une place centrale par ses évocations répétées, avant même son apparition. La question de la liberté humaine face à la création se pose ici à travers la chute ; c'est-à-dire, dans l’appréhension de la finitude, de la corruption et d’un retour au néant, conformément au cycle de la nature. Pour l’auteur, tout cela ne doit pas être compté au nombre des maux. Ainsi donc, le vivant côtoie le mortifère, partout et en toutes choses, parce que ces choses ne sont rien par elles mêmes. Les œuvres vivantes se révèlent à l’homme selon l’usage qu’il en fait : « les poisons ont paru avec les plantes nourricières, la ciguë avec le blé, l’ellébore, l’aconit, la mandragore et le jus de pavot avec le reste des plantes dont nous tirons notre vie » (Homélie 5). Les maux et les nuisances ne sont pourtant pas inhérents aux œuvres de Dieu, dont Saint Basile réaffirme sans cesse la bonté, mais ils semblent plutôt conditionnés par les perspectives humaines.

Dans l’homélie portant sur les productions de la terre, l’auteur place régulièrement l’homme dans le rôle d’un cultivateur, capable de corriger l’acidité de la grenade ou l’amertume de l’amande  par ses soins. En cela, il insiste sur les responsabilités de l’homme face à la nature. Mais la notion de correction s’accompagne bien souvent d’un risque de déviance… Quant à la terre, Saint Basile associe sa perfection à sa fécondité. Au-delà des cultures terrestres, c’est toujours l’accomplissement de l’homme lui-même qui se reflète dans la croissance de la moindre brindille : « L’homme est une plante céleste » (Homélie 9). Et cette plante se trouve dans le même rapport avec Dieu, que la création avec l’homme. La nature fait alors office de miroir qui nous renvoie l’image de nos vertus et de nos fruits, comme de nos venins et de nos stérilités.

A ce sujet, l’évangile compare fréquemment l’homme à une semence, et les écritures abondent en métaphores végétales, qu’il s’agisse de l’olivier, du figuier, de la vigne, du blé, de l’ivraie… auxquels Saint Basile fait lui-même référence. Force est de remarquer que Dieu parle à l’homme au travers de sa création, et qu’il lui donne les moyens de s’y reconnaître.

 

Il n’est pas aisé de savoir dans quelle mesure la création a été modifiée par la chute. L’hexaëmeron décrit la nature telle qu’elle était au IVème siècle, et non pas telle qu’on se représente un Eden originel. Saint Basile fait toutefois des allusions à une beauté plus complète : « la rose était sans épine : l’épine a été ajoutée depuis à la beauté de cette fleur afin que la peine, pour nous, soit près du plaisir, et que nous puissions nous rappeler la faute qui a condamné la terre à nous produire des épines et des ronces » (Homélie 5). Dans l’évangile,  la parabole du semeur donne aux ronces et aux épines la signification de « soucis du siècle et des  séductions des richesses ». Les épines en question semblent donc correspondre à des tendances humaines, davantage qu’à une défectuosité subite dans l’ordre naturel.

De nos jours, il est fort malaisé de se reconnaître soi-même dans la contemplation de la nature. Au lieu d’un miroir, c’est maintenant un écran qui se dresse entre l’homme et la création, en toute opacité. Cet écran reçoit inlassablement nos projections de toutes sortes, et nous nous retrouvons prisonniers de nos propres images, sans accomplissement effectif.

 

A travers sa description des êtres animés, Saint Basile continue de faire référence à l’homme, avec tout l’éventail de ses facettes. La description des animaux, de leurs instincts et de leurs ruses, s’y accompagne de sentences morales. Bien qu’il n’y ait aucun rapport direct, on pense par association aux fables d’Esope ou de La Fontaine, voire même aux Caractères de La Bruyère… Au-delà de la condition humaine (préalablement reflétée dans le monde végétal), c’est donc la comédie mondaine qui semble transparaître dans la contemplation de la faune. Saint Basile nous donne à voir l’industrie des abeilles, le labeur des fourmis, la vanité du paon, la vindicte du chameau, la volupté de la poule, la loyauté du chien, la fidélité de la tourterelle, la cruauté du charognard, l’habileté du crabe pour venir à bout de l’huître,  l’hypocrite dissimulation du polype, etc… La description qu’il en fait est particulièrement anthropomorphe, car ce sont toujours les vices et les vertus de l’homme qui sont illustrées derrière l’instinct. Dans cette optique, la nature semble sujette à une sorte d’éclatement dont chaque morceau serait une figure résiduelle. Ainsi, la restauration d’un Tout et d’une harmonie consciente correspondraient du même coup à un accomplissement total, via l’accomplissement de l’homme.

 

Dans une dixième homélie (apparemment controversée) portant sur l’origine de l’homme, Saint Basile évoque la dimension humaine en tant que microcosme. Cette idée se retrouve en filigrane dans son héxaëmeron. Il s’agit là d’une pensée que l’on retrouve également dans d’autres systèmes religieux et philosophiques, notamment dans l’hindouisme (avec la correspondance de l’âtman au brahman), ou dans le taoïsme (où l’homme est le réceptacle du Tao qui régule l’univers). Certes, ce sont là des systèmes qui ne se fondent pas toujours sur l’idée d’un dieu créateur et transcendant, mais plutôt sur une sagesse naturelle. Quoi qu’il en soit, Saint Basile décrit cette sagesse comme un attribut inhérent à la création. Il s’agit plus précisément de l’un des dons que Dieu lui a fait en la créant : « Au commencement, Dieu créa ; il (Moïse) ne dit pas enfanta, produisit, mais créa... Par ces mots, non seulement il veut donner une cause au monde, mais annoncer qu’un être bon a fait une chose utile, un être sage une chose belle, un être puissant une chose grande » (Homélie 1). Cela explique que certains animaux dépourvus d’esprit puissent être donnés en exemple par Saint Basile (et d’autres en contre exemple), alors même qu’ils ne sont conditionnés que par l’instinct.

 

L’exaltation d’une société humaine calquée sur la nature est particulièrement visible dans le passage où Saint Basile décrit le fonctionnement d’une ruche. Ses observations y sont très caricaturales, extrêmement anthropomorphiques et peu réalistes quant au rôle de la reine chez les abeilles, mais elles rendent bien compte de la valeur qu’il donne à l’ordre naturel par rapport à d’autres systèmes : « Leur roi n’est pas élu par le suffrage du peuple parce que l’ignorance du peuple élève souvent à la principauté le plus méchant homme ; il ne reçoit pas son autorité du sort parce que le caprice du sort confère souvent l’empire au dernier de tous ; il n’est pas assis sur le trône par succession héréditaire parce que trop ordinairement les enfants des rois, gâtés par la flatterie et corrompus par les délices, sont destitués de lumières et de vertus : c’est la nature qui lui donne le droit de commander à tous, étant distingué entre tous par sa grandeur, par sa figure, par la douceur de son caractère ».  (Homélie 8).

Saint Basile reconnaît ainsi à la nature une sagesse propre, sans pour autant occulter l’esprit saint qui doit la vivifier. La distinction entre les notions de sagesse et de sainteté est si subtile qu’elle a sans doute entraîné quelques confusions d’usage, et la confrontation de certaines doctrines plutôt que leur complémentarité. La sagesse telle qu’elle était comprise dans le monde hellénique  diffère de la sagesse liée à la Torah qui diffère elle-même des différents courants liés à la gnose, et ces différentes formes d’expression diffèrent évidemment de la sagesse en tant qu’ordre naturel. Mais là encore, nous pouvons constater l’universalité de telles notions, bien que sous des formes variées : dans la Chine ancienne, au IVème siècle avant Jésus Christ, Confucius, prononçait ces mots : « Je ne m’attends pas à trouver un saint aujourd’hui. Si je pouvais seulement trouver un sage,  je m’en contenterais ».

Parmi tant d’images diverses, entre une philosophie naturelle, des préceptes divins et une action transcendante, à travers les responsabilités et les abus de l’homme, tentons maintenant de retrouver une perspective d’unité.

 

 

 

 III.             METAMORPHOSES  ET  UNITE


Dans un monde naturel où la matière se régénèrerait elle-même, de façon neutre et automatique, il n’y aurait pas de place pour un Dieu créateur, et l’accomplissement des êtres correspondrait seulement à leur maturité ou à leurs productions. Or, Saint Basile évoque un univers qui ne saurait s’auto suffire. Toute la problématique de son discours réside dans la communion de la création et de l’esprit Saint ; c'est-à-dire, dans la transfiguration de toutes choses par Dieu. Cette idée n’est pas toujours exprimée de façon très claire. Les différents degrés d’évolution spirituelle, les transformations sensibles de la nature et l’annonce de la résurrection sont abordés les uns après les autres comme de petites esquisses, sans développement approfondi.

 

Dans un premier temps, Saint Basile pose l’hypothèse d’un monde qui n’acquérrait sa forme et sa visibilité qu’à travers le regard de l’homme : « La terre est appelée invisible pour deux raisons : ou parce que l’homme n’existait pas encore pour la contempler, ou parce qu’étant inondée par les eaux, elle ne pouvait être aperçue » (Homélie 2). Certes, il préfère retenir la seconde proposition, mais la pensée d’un monde qui se révèle dans le regard de celui qui le contemple est pourtant ébauchée. Saint Basile prend encore une fois le parti de la simplicité, et n’aborde que vaguement la réalisation complète des choses créées, sans doute parce que « tout ce qui tombe sous nos sens est si admirable que l’esprit le plus pénétrant n’est pas en état d’expliquer le moindre des objets qui sont dans le monde » (Homélie 1).  Il use plus volontiers d’images sensibles et directement accessibles à l’entendement : « Songez à ce qu’on rapporte du ver à soie qui, étant d’abord une espèce de chenille, devient chrysalide avec le temps, et ne tarde pas à quitter cette forme pour prendre les ailes d’un papillon (…) prenez de là une idée sensible de la résurrection et croyez les changements que Paul nous annonce à tous » (Homélie 8).

Malheureusement, ce type d’image ne met pas l’accent sur l’intériorité, si ce n’est par petites  touches allusives…

Outre les différents niveaux de perceptions et les transformations naturelles, il existe une autre sorte de métamorphose, à la fois liée aux unes et aux autres. Cette dernière est inhérente à l’histoire de l’homme et à ses paradigmes successifs. En effet, l’hexaëmeron de Saint Basile appartient à une époque et se pose dans un cadre daté. Les raisonnements qu’il mène et la perception qu’il a du monde sont eux-mêmes soumis à des courants de pensée temporels et fluctuants.

 

 L’auteur parle toutefois avec autorité, et adopte une position combative vis-à-vis des idées  divergentes. Les homélies sont criblées d’attaques contre les apôtres de l’erreur, les philosophes du paganisme, les juifs, les hérétiques, les ennemis de la vérité  ou autres fous… Ce genre d’attitude n’est pas propre à Basile en particulier, mais il y a là quelque chose de choquant et de désagréable dans ces attaques ou ces « querelles d’écoles ». D’une part, certaines doctrines erronées ou condamnées (comme celle des manichéens) se sont malgré tout distillées dans les consciences, de façon indirecte et pernicieuse, parce qu’elles correspondaient à des dualités intimes. Et d’autre part, il est malaisé de défendre une Vérité immuable en adoptant soi-même des formes corruptibles. Sans doute faut-il savoir relativiser chacune des images que nous empruntons, chacun des mots dont nous usons, parce que l’Esprit ne se laisse pas enfermer dans la Lettre

 

 L’hexaëmeraon de Saint Basile a surtout de la justesse lorsqu’il évoque la beauté de la création, la responsabilité de l’homme, et l’absence de mal inhérent aux œuvres de Dieu. C’est pourquoi il est dommage de le voir manquer de patience dans sa façon de corriger les erreurs de ses contemporains. Cette tradition de la condamnation et de la division a fort peu de rapport avec le message évangélique (cela dit en passant…). Saint Basile s’emploie néanmoins à montrer l’unité, la cohérence et l’harmonie d’un univers créé en vu d’un accomplissement. Or, qu’en est- il aujourd’hui ?

 

Si la nature est belle et bien conditionnée par le regard que l’homme porte sur elle, elle se voit mondialement réduite à l’état de marchandise. Jamais exploitation ne fut plus générale et forcenée. Il est fort possible que la désacralisation de la nature ait mis l’accent sur son utilitarisme, et ait ainsi contribué à cette situation. Le monde fonctionne effectivement de manière auto suffisante, et les notions de  production correspondent au seul accomplissement possible. Il est pourtant permis de se montrer optimiste, car les abus de l’homme lui fournissent plus que jamais l’occasion de prendre conscience de ses responsabilités.

 

Pour reprendre l’image de Saint Basile quant aux transformations annoncées, nous pouvons nous figurer que le monde se trouve actuellement dans l’état d’une chrysalide, ayant déjà abandonné sa forme passée, ses cadres et ses repères, mais n’ayant pas encore acquis sa forme nouvelle. Bien que les églises institutionnelles n’aient pas particulièrement d’impact sur l’ordre du monde, il existe un véritable approfondissement des esprits, et une prise de conscience authentique, même en dehors de tout cadre. Certes, il y a aussi beaucoup d’angoisse et d’égarement mais, malgré les voies dérivatives, le désespoir et le cynisme, il n’est pas exclu que chacun retrouve lui-même le chemin de son accomplissement, du fait même de la nécessité.

Saint Basile évoquait dans sa neuvième homélie, les difficultés éprouvées par l’homme pour se connaître lui-même. Rien n’est pourtant plus essentiel à l’achèvement de la création. Saint Basile évoque également dans cet hexaëmeron le peu de valeur que nous attribuons aux choses que nous obtenons trop facilement. Ainsi, il se pourrait que notre monde de production et de consommation effrénées nous renvoie lui-même l’image de notre vide, et redevienne pour nous cette école où l’esprit peut s’instruire.  Les modifications du temps et des sociétés, le renouveau de l’œil porté sur la nature et les métamorphoses de l’âme pourraient être le cheminement effectif de l’homme vers son union au divin.

 

  

  

CONCLUSION


Nous n’avons pas passé en revue tous les objets divers que Saint Basile détaille dans son hexaëmeron et dont il s’émerveille, mais nous avons mis en lumière l’hommage qu’il rend à la création. Ses homélies sont l’occasion d’un vaste déploiement qui va des eaux souterraines jusqu’aux strates de l’invisible, en passant par tout ce qui vit, rampe, germe et chante…

Le dogme de la création y est défendu avec éloquence, et c’est là le fondement de son exégèse. Ainsi, nous avons vu que l’univers recèle un sens, une cause et une unité, mais que cette harmonie n’est pleinement effective que par l’esprit et l’accomplissement.

Saint Basile a beaucoup insisté sur les empreintes que Dieu a laissées dans la nature, et qui permettent de connaître l’ouvrier à partir de ses œuvres. Nul autre que l’homme n’est capable de les décrypter, et les homélies nous rappellent à quel point nous vivons dans une réelle  interdépendance avec les moindres des éléments. Un tel discours inscrit l’anthropologie au cœur même de la cosmologie.

 

 La fin de l’hexaëmeron a pourtant un caractère inachevé. L’annonce de la création de l’homme, si longtemps préparée, demeure en suspens, et l’homélie se termine sur des considérations démonstratives quant à la trinité, et quelques attaques contre l’hérésie… Evidemment, l’image de l’homme est omniprésente dans le discours de Saint Basile, mais uniquement par rapport et par association.  Or, cette mise en suspens de la question humaine est sous doute la plus jolie (et la plus juste) façon d’achever ces homélies ; c'est-à-dire, en laissant la question ouverte.

 
 

 

 

 

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12 avril 2009 7 12 /04 /avril /2009 21:02

 Mon coeur appartient à papa... Je me suis longtemps demandée si le thème était cérébral ou culturel au moment de classer l'article dans une catégorie. Hé bien, disons que c'est cérébral.

marylin-monroe filletteAvant de retranscrire les paroles de cette chanson (chantée par Marilyn dans le Milliardaire), je vais tenter une petite analyse... Non pas de la chanson en elle-même, cela dit, mais de l'effet de cette chanson dans la bouche de cette actrice. Et là je ne parle pas réellement de l'actrice non plus, ni de son personnage, mais de la personne, en considèrant l'ensemble de son cheminement.
Thème psychanalytique par excellence s'il en est : l'abandon par le père, et la non reconnaissance. Je ne vais pas revenir trop longtemps sur la biographie de la star qui après être née sous une fausse identitée (car de père inconnu), retirée à une mère psychiquement fragile, placée en famille d'accueil (où il semblerait qu'elle ait subi quelques abus sexuels), et s'être mariée à seize ans pour fuir ladite famille, entreprit son "passage initiatique" vers le panthéon des étoiles. Les êtres qui deviennent des mythes synthétisent toujours des paradoxes. Honte et gloire, dans ce cas, mais pas seulement... Marilyn-Monroe-nn.jpgLe prénom qu'on lui attribua est très intéressant quand on parle de paradoxe. Marie + Lyn. Marie renvoie à la passivité d'un miroir, le "capax dei", la pure réceptivité, mais signifie littéralement : celle qui élève. Lyn signifie cascade/ avalanche ; la chute puissante dont le mouvement est descendant. Bref, toujours mes petites manies à raisonner par analogies.
On m'objectera que Marilyn n'était pas son vrai prénom. Certes, Norma Jeane n'était pas prédestinée de la sorte. Mais s'il y a bien quelque chose dans ce mythe qui évoque la femme totale, c'est qu'au départ, il s'agit précisément de la femme normale. NORMALE, en lettres majuscules, puisque telle est la prédestination : la norme. Norma signifiant "la règle". Oui oui, je vais loin, mais c'est ainsi. Je n'invente rien.


Autre chose intéressante, c'est le corps de la femme à travers les siècles. Je veux dire : les différents modèles de corps de femme. Au moyen âge, par exemple, c'est un corps fin avec une poitrine juvénile et un ventre de femme enceinte de cinq mois. Bizarre... Mettre le ventre en valeur était si important, qu'elles portaient toutes des petits coussins sous leurs robes. Regardez les tableaux de cette époque ! A d'autres moments, il faut des hanches, des crinolines, des faux culs. La femme de la grèce antique est athlètique. La française de la cour du roi soleil est bien grasse. Ici ou là, la femme doit avoir de longues jambes, un corps solide et endurant, des petits pieds enrubannés, un long cou, etc... Aujourd'hui, l'accessoire en vogue, c'est le sein regonflé. Difficile de trouver des soutiens gorge qui ne soient pas rembourrés quand on fait les boutiques. Tout ceci n'a rien d'anodin. Pourquoi le ventre au moyen âge ? Pourquoi le sein de nos jours ? Le ventre symbolise la gestation, l'être à venir. Les hanches sont un indice de fécondité : un potentiel de productivité. Les seins renvoient à l'allaitement, à la pulsion élémentaire/ alimentaire (comprenons : la consommation). La maigreur féminine renvoie à quelque chose d'asexué, d'androgyne, indifférencié, une dynamique affranchie, virtuelle... La maigreur et la grosse poitrine sont deux éléments fort en vogue actuellement. Quoique la forme athlètique revienne en force. Et dès lors, les modèles feminins nous informent des phases du monde, ou des représentations qu'on s'en fait à travers équilibre, excès, pathologie, etc...
marilyn-monroe-jeunetteNon non, je ne m'éloigne pas du sujet. J'en reviens à Marilyn. Femme plantureuse, dont l'époque produisait tout autant qu'elle consommait. L'équilibre dans l'abondance, en somme. Avant de s'appeler Marilyn, Norma fut plus fine. Il y a même des photos où elle se contorsionne comme une gymnaste. Mais après tout, elle suit une progression normale vers la pleine maturité d'un fruit explosif. Le sociologue Edgar Morin identifia Marylin Monroe à la fin du star system. Dernière star fabriquée. Star dont l'auto destruction éclata au grand jour, comme l'envers du décor. Figure qui demeure pourtant un mythe tenace. Femme totale, promise au vide qui lui fait face. Car il n'y a pas de "papa", au sens de ce qui fait sens. Ni avant, ni après, rien qui apporte cette re-connaissance. Et rien qui fasse office de "père" dans ce grand univers infantilisé à outrance, rempli de vaches à lait et de traite en série. La chansonnette est bien tragique sous cet angle... Mais ce n'est qu'un point de vue.

Bon, voici maintenant les paroles de MY HEART BELONGS TO DADDY, cet autre classique du jazz...   

                           

INTRO : My name is.. Lolita
And... I'm not supposed to.. play with boys !
Mon coeur est à Papa
You know... le propriétaire
                                                   pin-up

While tearing off a game of golf                                           
I may make a play for the caddy
But when I do I don't follow through
Cause my heart belongs to Daddy !

If I invite a boy some night
To dine on my fine food and haddie
I just adore his asking for more
But my heart belongs to Daddy !


Yes my heart belongs to Daddy                                                 
So I simply couldn't be bad !
My heart belongs to Daddy
Da da da da da da da da daaad
So I want to warn you laddie
Through I know that you're perfectly swell
That my heart belongs to Daddy
Cause my Daddy, he treats it so well


While tearing off a game of golf
I may make a play for the caddy
But when I do, I don't follow through
Cause my heart belongs to Daddy !


If I invite a boy some night
To cook up a fine enchilada
Though Spanish rice is all very nice
My heart belongs to Daddy (da da da)


Yes, my heart belongs to Daddy
So I simply couldn't be bad
Yes, my heart belongs to Daddy
Da da da da da da da da daaad

So I want to warn you laddie
Through I know that you're perfectly swell
That my heart belongs to Daddy
Cause Daddy, he treats it so well

 

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11 mars 2009 3 11 /03 /mars /2009 18:25

La gorgone, dans sa première acception, s'inscrit dans la descendance des divinités primordiales du panthéon grec. Dans la lignée de Pontos, c'est à dire : la mer noire...
Au nombre de trois, les gorgones sont des créatures reptiliennes aux chevelures serpentines, immortelles (sauf une !), et ont pour particularité de transformer en statues tous ceux qui croisent leur regard. Ceci est la première définition. Le premier type, en somme. Mais il faut raconter la légende. 
Parmi les trois gorgones, seule Méduse est mortelle. Celle ci se fit trancher la tête par Persée, un jeune héros qui en profita pour délivrer Andromède d'un monstre qui voulait l'avaler. Au commencement, un roi voulant éloigner le jeune Persée du royaume, l'envoya un beau matin dans le domaine des  ombres  avec pour mission d'en rapporter la tête de ladite Méduse. Certes, il n'était pas prévu que le jeune homme survive à ce défi... Mais la déesse Athena prit notre jeune héros sous son aile. Elle lui fournît un casque et un bouclier magiques, et lui expliqua comment s'y prendre avec la créature sans se faire pétrifier. D'une part, le casque rendait invisible (c'est déjà fort pratique). D'autre part, le bouclier devait servir de miroir. Ainsi le jeune homme ne regarda jamais vraiment la Méduse mais seulement son image à travers le bouclier, avançant discrètement sous son casque sans être vu par les deux autres. Voilà comment se fit la "décapitation". Notons aussi que, même morte, les yeux de la gorgone conservèrent leur pouvoir, et que Persée s'en servit contre nombre d'ennemis, sortant toujours fort à propos la tête coupée d'un sac.

Maintenant, abordons la gorgone dans son acception psychanalytique. Une autre version du mythe fait état de l'extrême beauté des trois gorgones. Dans ce cas, il serait question de jeunes filles si narcissiques, si fières de leurs beaux cheveux, qu'un dieu les aurait punies en y mettant des serpents, et en transformant en pierres chacun de leurs admirateurs. Cette seconde acception existe d'ailleurs en germe dans la première. Il s'agit là de jeux de regards et de reflets qui se heurtent au mur de l'orgueil. Enfin, un truc dans ce goût là... On trouve d'ailleurs certaines images très plantureuses de la gorgone, ou autre femme serpent. De somptueux corps féminins se terminant en queues de reptile... quoiqu'il y ait confusion avec d'autres divinités, fort anciennes, elles aussi...
Klimt a représenté les gorgones dans un tableau où la Mort, la Démence et la Maladie figurent à l'arrière plan. Humm...

Mais abordons enfin la gorgone du troisième type. C'est à dire : le pur processus de pétrification. Ici, point de serpents. Et là, c'est la gorgone qui est invisible. Elle s'introduit on ne sait comment dans les échanges entre les êtres. Chacun croit regarder l'autre, celui d'en face, mais elle se trouve entre les deux, dans chaque rapport, chaque relation, chaque transmission. Et dès que le regard se porte vers elle, même par inadvertance, elle pétrifie les deux partis. C'est ainsi. Elle fige et crée des murs. Elle collectionne les statues. Et elle en a beaucoup, beaucoup, beaucoup...
 N'est il pas étrange qu'on ait si peu étudié le mythe de la gorgone ? On connait celui de Prométhée, d'Oedipe, de Narcisse... On connait le rôle qu'ils jouent dans nos rapports avec l'histoire, le destin, le progrès, le psychisme... Et rien sur la gorgone qui est pourtant partout ? Celle à laquelle je fais allusion, comme la plus insidieuse des monnaies d'échange... Celle qui échange la chair contre la pierre, et enferme l'esprit dans le marbre. Elle n'est jamais très loin.

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22 décembre 2008 1 22 /12 /décembre /2008 22:04

 

 Il y a une image de la femme fatale, issue tout droit du film noir, et parfaitement incarnée par Ava Gardner dans Les tueurs ... Cette image de l'actrice assise sur une table ronde,  les jambes croisées et découvertes sous une robe-foureau noire, une lampe braquée sur elle, le regard noir et fixe sous sa chevelure noire également, a si bien marqué les esprits que bien des gens ont longtemps cherché en vain cette scène dans le film. Or la pose n'y figure pas comme telle. Seule l'atmosphère y est.

 

ava-gardner-dans-les-tueurs.jpg
La fatale petite créature du film, menteuse et déloyale, nous renvoie comme toujours à la vieille image d'Eve (encore, oui) mère originelle du péché et de la mort. La première femme fatale, donc. Mais si je prends la peine de m'arrêter sur cette image, c'est que je viens juste de remarquer l'analogie entre les "noms" de ces deux personnages. Certes, il est facile de noter qu'Eve et Ava ont la même racine. Mais que dire de Gardner, étrangement apparenté aux mots garden et gardener qui nous renvoient au jardin et à la fonction première que l'homme Adam y occupait ? L'analogie est sans doute fortuite, mais bon... D'ailleurs, Ava Gardner, déjà associée dans nos mémoires à la sensualité brute, est sans doute plus connue sous un autre surnom : le plus bel animal du monde.

Loin loin loin de cultiver les fruits défendus de cet immémorial Eden, je vous laisse admirer l'ombre planante de la pécheresse qui (outre la connaissance bien mal acquise) n'en finit pas de servir de muse.

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12 septembre 2008 5 12 /09 /septembre /2008 16:19


Jung ne donna jamais à la libido le même sens que Freud... Pour lui, la pulsion de vie ne pouvait pas se jouer dans le triangle papa/maman/moi, mais au point d'interaction entre deux aspects de cette même pulsion, dissociés par notre intellect, et néanmoins indissociables à la source...

Je ne suis pas claire, sans doute. Jung a explicité la chose par ailleurs. Mais j'ignorais qu'il eût un rêve, et que ce rêve manifesta l'intuition de ce qu'il nommerait par la suite anima et animus. Dans ce rêve, il se voyait lui même rencontrant un couple étrange. Un vieillard et une jeune fille... Le voici, tel qu'il le narra dans ses "mémoires" :

"J' écoutais avec attention ce qu'ils me disaient. Le vieil homme me dit qu'il était Elie et j'en ressentis un choc. La jeune fille me désarçonna presque davantage encore, car elle dit s'appeler Salomé. Elle était aveugle. Quel couple étrange : Salomé et Elie ! Pourtant Elie m'assura que Salomé et lui étaient liés de toute éternité et cela mit le comble à mon désarroi. Avec eux vivait un serpent noir qui manifestait pour moi une inclination évidente. Je m'en tins à Elie parce qu'il me semblait être le plus sensé des trois et disposer de bon sens. Vis à vis de Salomé j'étais méfiant. Elie et moi eûmes une longue conversation dont je ne pus saisir le sens ..."


Plus loin, Jung interprète ces figures comme l'incarnation de deux principes : le logos et l'eros. Certes, il y a de multiples figures correspondant à celle du sage et du prophète en dehors de celle d'Elie. Quant à la féminité, je me suis demandée pourquoi justement Salomé.
 A moi aussi donc, une telle association parut des plus curieuses. Etrange, surtout quand on sait que l'évangile présente Jean Baptiste comme la "réincarnation" d'Elie; ce même Jean Baptiste ayant eu la tête coupée sur l'ordre aveugle de Salomé... La chose a de quoi questionner. Vraiment, vraiment... Ou bien, est-ce évident ? Enfin, il ne s'agit là que d'un rêve, et il nous est loisible d'y voir ce que l'on veut.

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11 août 2008 1 11 /08 /août /2008 21:00


Par hasard, ces jours ci, au cours d'une errance sur le flux internet, je suis tombée sur un article riche en sarcasmes et tout juteux de fiel... Hmm, la chose est ordinaire. Sauf que là, la "vedette" à abattre, la "starlette" du PAF mise au pilori, l'icône du petit écran en question, se trouva être une amie d'enfance et son évocation permit le soudain jaillissement de ma première année de collège dans un pensionnat de Maison Laffitte, sous la surveillance d'une très vieille fille aigre à tignasse roussie, escortée d'un caniche noir nommé Bérénice... Bref, j'eus une petite émotion à voir réapparaitre Tania Bruna-Rosso sous mes yeux (je n'écoute pas radio Nova, il est vrai... Et je ne regarde même pas le grand journal de canal+) reconvertie en chroniqueuse "bobo" et accessoirement en pute à frange (telle qu'elle se qualifie elle-même, via l'extravagante auto dérision d'une initiative personnelle visible sur son site)... Notre charmanteTania figure au centre de la photo, et c'est vrai qu'elle n'a pas changé, quoique je sois chagrinée des petites atrocités qui circulent sur son compte. Cela dit, dans un tel univers, il suffit que quelqu'un parle de soi pour que tout aille bien, même en mal. Cette jeune personne qui était très bonne élève, très créative et authentiquement gentille dans sa douzième année méritait un petit hommage de ma part pour contrebalancer l'article qui suit (quand même très drôle), que je me permets de reproduire ici, bien qu'il soit plutôt méchant. Enfin, au delà des ses discutables(?) chroniques musicales, ladite Tania a surtout le mérite de faire partie de ma mythologie personnelle et d'être restée un bon souvenir.
Je me demande ce qu'elle lui a fait, à ce Nathanael...



 Mesdames et messieurs, laissez moi vous présenter la première candidate au poteau d'exécution virtuel de notre non moins virtuel et très instable tribunal du bon goût, élue à l'unanimité de notre jury de une personne, l'animatrice la plus exécrable de tout le PAF, pim, pam, poum, roulements de tambours, mesdames et messieurs, la très imbitable (rien de sexuel, prenez un dico), la délicieusement haïssable Tania Bruna-Rosso.


Affublée d'un nom d'actrice porno italienne des années 80', comme si sa coiffure de pute à frange étudiée à la mèche près et ses airs de pimbêche suceuse de glands mondains ne suffisait pas à l'enterrer définitivement dans notre mémoire à court terme, l'accusée n'a jamais fait le moindre effort pour échapper à la vindicte de notre courroux populaire. Cette jeune fille officiait encore il y a peu derrière le micro de Radio Nova, et l'on comprend pourquoi, elle a vraiment une tête à faire de la radio. Pire encore, Tania Bruna-Rosso n'a jamais tenté de se dérober aux barrières serrées de notre scepticisme serré, préférant chaque soir en rajouter encore dans son atroce personnage de petite fille de bourge détestable au possible, ne tentant même pas d'être vulgaire pour en rester uniquement au stade de la pure obscénité télévisuelle.


Tout cela aurait pu être encore acceptable, quoi de plus normal que de voir une greluche de sa trempe squatter les plateaux télés sans vergogne en ces temps de misères où la presse spécialisée (on se demande encore en quoi) tente régulièrement de nous faire gober à grands coups de couverture médiatique assassine que l'avenir de la musique passe par ses copines de l'électro-clash putassier et leurs potes à mèches fringués comme des pubs H&M.Mais non contente d'être la nouvelle égérie mal fagotée d'une génération perdue pour la mode, et bien trop encline à confondre la classe et la coquetterie (John Wayne aurait apprécié), l'accusé devra répondre des lourdes charges qui pèsent contre elle pour avoir été ces derniers temps une des plus ferventes défenseuses de tout ce qui peut ressembler de près ou de loin à de la merde radiophonique bon chic bon genre, écrite directement au balais à chiottes par des handicapés congénitaux dont la poésie de fond de poubelles oscille périlleusement entre le bredouillage parkinsonien et la vomissure nauséeuse que viennent leur cracher à la gueule de faméliques débris humains de vingt ans. Et vous m'excuserez d'avoir paraphrasé Desproges pour l'occasion, reprenez moi plutôt si vous me surprenez soudainement à paraphraser Jean-Marie Bigard ou tout autre soutien sarkozyste dépourvu d'humour au-dessus de la ceinture.


Mesdames et messieurs du jury, reprenons. Ce qui nous dérange le plus dans le personnage public de Tania Bruna-Rosso, c'est sans aucun doute l'ignorance crasse dont sait faire preuve avec une régularité déconcertante la chroniqueuse musicale la plus influençable de la planète, elle qui se veut symbole d'une certaine contre-culture et n'est que le pâle reflet d'une sous-culture répugnante teintée d'opportunisme malsain, uniquement dictée par la puissance médiatique des majors du disque et le NME d'il y a trois mois. Quand elle ne se joint pas de sa voix suraiguë (une voix qui a elle seule lui permet d'arriver en tête de notre palmarès des cruches à abattre) donne au concert de vagissements désespérants qui salue chaque mois la nouvelle sensation anglaise dont on aura bientôt oublié le nom. Superficielle à souhait, plus hype que nature, parisienne et parisianiste jusqu'au bout de ses ongles peint en rouge sang, ce sang de la révolution culturelle dont elle se barbouille le corps avec délectation.


Pour toutes ces raisons, et pour bien d'autres encore, mesdames et messieurs les jurés, je vous demande de condamner l'accusé à la peine maximale.

Tania Bruna-Rosso, au poteau !

Par Nathanael Hunt

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1 juillet 2008 2 01 /07 /juillet /2008 19:21

Une légende relate l'existence d'une citée merveilleuse, un peu dans le genre de l'Atlantide, qui aurait elle aussi sombré dans les flots lors d'un énième déluge, et sur les vestiges de laquelle le peuple inca aurait bâti sa culture... En vérité, il n'existe pas de traces de cette cité, excepté un temple retrouvé sous la surface du lac Titicaca. Un temple solaire, je suppose. Il faut pouvoir imaginer le feu jaillaissant des eaux, car la mythologie inca représente ainsi la naissance du dieu des dieux (le soleil) sortant tout naturellement de ce lac avant de créer le reste de l'univers.


Le mythe des mondes engloutis, menacés d'engloutissement, ou subitement exhumés de leurs ténèbres, est un grand classique. Il ne s'agit même pas vraiment de "mythes" au sens où on l'entend, mais de choses quotidiennes... Il y a des cités englouties ou brisées par les eaux, par la boue, le magma, le vent, etc... dont on retrouve après coup les vestiges. Les petites maisons de bois américaines sont fréquemment emportées par le vent, après quoi les survivants reconstruisent gentiment leur demeure, toujours en bois. Là où les tornades sont les plus fréquentes, c'est dans le centre de l'Amérique du Nord, à l'est des Rocheuses. On les retrouve sur les états situés dans le "Chemin des tornades" (i.e. Oklahoma, Nebraska, Kansas et Missouri). Cela donne envie d'imaginer un dieu aérien, probablement celui du tonnerre, vénéré parmi les indiens qui connaissaient bien leur terre... Toutefois, les indiens d'Amérique ne sont pas les seuls à avoir vénéré ledit Tonnerre qu'on retrouve également en occident sous les traits de Zeus... Mais je m'éloigne de la question.
Revenons à l'engloutissement. Peut-on être englouti dans la vie de tous les jours ? Et est-il vrai qu'un astre macrocosmique puisse en faire l'expérience ? Je crois que oui. C'est très naturel, pour les hommes comme pour les astres, au physique comme au psychique.
En naissant, tout d'abord : nous passons de la douce poche d'eau tiède où nous barbottions, à l'air abrupt et froid du monde terrestre. C'est pourquoi nous hurlons en venant au monde, je suppose... Et puis, les chocs de ce type se répètent et n'en finissent pas, tout au long de notre vie jusqu'à la mort. Des formes d'engloutissement de plus en plus subtiles...
Quant au soleil, lui-même, ça dépend de sa taille. Lorsque la masse d'une étoile est importante et qu'elle arrive en fin de vie, l'étoile manifeste une force ultime pour dégager sa matière hors d'elle, et explose. Ceci est la plus belle mort que puisse rêver une étoile. Mais parfois, elle ne parvient pas à faire cet ultime effort, et c'est alors qu'elle se replie sur elle même. Dans le langage astrophysicien, cela se nomme : effondrement du champ gravitationnel. En clair, ça signifie que sa masse s'effondre de façon à ce que même la lumière soit entrainée vers le bas, créant ainsi un trou noir. Plus aucun rayonnement ne s'échappe de cette étoile morte, laquelle se condense en un point infime d'une lourdeur telle que tout autre astre passant à proximité, risque de basculer dans ce champ de gravité et de s'y engloutir. En langage médical, cela pourrait être une dépression fulgurante... Cependant, certains scientifiques ont découvert un rayonnement spectral, composé de particules singulières, allant plus vite que la lumière, et parvenant à s'échapper du trou noir. On peut donc espérer que ces particules échappées réduisent progressivement la matière de l'effondrement jusqu'à l'irruption de la lumière et qu' après plusieurs millions de milliards de millénaires de retard, l'explosion libératrice se fasse malgré tout. Mieux vaut tard que jamais.

Pour ce qui concerne notre système solaire, cela n'arrivera pas. En effet, notre soleil est trop petit pour exploser ou pour s'effondrer sur lui même. Il va donc se dilater, devenir une géante rouge, puis se refroidir lentement, jusqu'à devenir une naine blanche... Une petite mort, à petit feu, donc. Mais nous ne serons plus là pour le voir (brûlés par les émanations de la géante rouge).
Bref, les éléments dont nous sommes constitués nous parlent à tous les niveaux de la nature et du cosmos. Et il n'est pas si rare de croiser un soleil englouti dans l'immensité de l'univers...

 

boule-de-feu_.jpg

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8 juin 2008 7 08 /06 /juin /2008 15:07

Le plus ancien mythe féminin, c'est celui de la Lilith : la première femme...

Cette légende est vraisemblablement née d'un accident et d'un malententdu, quoique. La Bible étant un ensemble de récits compilés à diverses époques et dans diverses traductions, il se trouve que la génèse relate deux fois la création de la femme : une première fois où celle ci est créée en même temps qu'Adam, à partir de la terre, et à l'image de Dieu. Une seconde fois où la femme est créée à partir de la côte de l'homme, et nommée Eve par Adam.

Si la chose n'est pas un simple accident de traduction, ni une compilation de versions contradictoires, la Lilith a peut être un sens "exeptionnel".

Ainsi Lilith existait avant Eve, et résidait dans l'Eden, non pas en tant qu'aide de l'homme (c'est ainsi qu'Eve est désignée dans la génèse), mais comme l'égale d'Adam. La Lilith n'était donc pas un complément, mais bien la femme complète. Un conflit éclata cependant dans le couple, car Adam revendiquait la domination pendant l'acte sexuel. Irritée contre son époux, Lilith quitta l'Eden. Adam éperdu, alla se plaindre auprès de Dieu qui envoya une nuée d'anges vers la femme afin de la convaincre de revenir. Lilith refusa et préféra (selon le mythe) s'unir à un avatar de Satan, après avoir négocié un rôle égalitaire.
Dieu tenta alors d'amener chacun des animaux de la création vers l'homme afin de lui trouver un compagnon et de le consoler de sa peine. Mais rien n'y fit. Adam se sentait irrémédiablement seul. C'est alors que Dieu fit sombrer l'homme dans un profond sommeil...
Hmmm oui, ce sommeil nous interroge, et le rêve qu'il fit aussi, car il semblerait qu'Adam n'en finisse pas de rêver. Mais poursuivons.

Pendant qu'Adam dormait, Dieu préleva une côte sur son corps et la façonna à l'image d'une femme. Puis il éveilla Adam et fit venir la nouvelle créature devant lui. L'homme en fut enchanté et la prénomma Eve.
Cependant, la Lilith, flottant sur l'onde obscure, découvrit cette nouvelle union et ne trouva pas la chose à son goût. On raconte qu'elle prit elle-même la forme du serpent tentateur afin de provoquer la perte d'Eve qui devint à son tour une pêcheresse aux yeux de l'humanité.
Plus tard, ce fut la vierge Marie que l'évangile nomma "nouvelle Eve"... Ainsi tournent et se suivent les femmes, s'annulant les unes les autres (et lorsque l'homme se montre habile, elles rivalisent haineusement entres elles)...

Mais si on en croit l'ordre dans lequel les choses se produisirent, le fruit de la connaissance avec lequel Lilith tenta Eve concernait avant tout sa propre légitimité. Et le premier péché fut donc la tentative d'Adam pour abaisser son épouse primordiale. Mais là encore, passons.

D'un point de vue ethnologique, la Lilith nous renvoie aux anciennes figures de la Terre mère et d'un certain "matriarcat" que l'avènement du Dieu unique renversa. En cela, elle pourrait être assimilée aux déesses Ishtar, Isis, Tanit ou Astarté. Souvent, ces déesses archaïques ont un rapport avec la mort et les mondes souterrains, quoique leur culte soit d'abord celui de la fertilité. Mais ne nous étonnons pas des contradictions. Lilith ne serait alors que la trace persistante d'un ordre révolu. Du reste, selon un autre mythe, c'est Pandora qui fut la première femme (armée d'une petite boite pleine de fléaux, car il faut décidément que la femme soit coupable de toutes les calamités).

Bref. En vérité, il se peut que tout ne soit qu'un rêve. Lilith, Eve et Marie sont éternellement le même principe féminin, et rien ne sert de le fragmenter en figures paradoxales. Les mondes souterrains n'ont sans doute rien à voir avec des mondes infernaux, mais ne sont vraisemblablement qu'un espace occulté (l'inconscient, comme dirait l'autre). Une totalité oubliée. Un équilibre des forces, sans cesse remis à plus tard.

Et Lilith attend peut être simplement qu'Adam se réveille.

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1 juin 2008 7 01 /06 /juin /2008 12:02

Il y a toujours quelque chose qui germe quelque part, et que l'on cultive (ou pas).
Des jungles et des jardins, oui... Mais aussi des terrains vagues, des marais, un terreau quelconque, enfin.
J'aime beaucoup les jardins chinois et japonais. On y trouve toujours un plan d'eau (un lac ou un étang). Des roches. Des floraisons particulières. Un exemple d'architecture...
Tout y semble toujours très naturel. La main de l'homme y reste discrète, quoiqu'il y ait sans doute une grande dextérité derrière ce naturel apparent.
Bien loin de cette influence taoïste, se déploie le jardin français. Ici même, dans ce labyrinthe, nous errons présentement parmi des formes géométriques et des conceptions dévolues à l'"hermétisme". Ce n'est pas en pleine nature que nous nous promenons, mais dans un dédale cérébral.
Au moins, nous sommes prévenus.


Le jardin n'a rien d'anodin. Non non non. Il a un rapport direct avec l'homme depuis son apparition sur terre, ou sa création dans l'univers... La génèse à laquelle se rapportent les trois monothéismes évoque le rôle d'Adam dans le jardin originel. Cet Eden...
Certes, les chinois ne s'y réfèrent pas, mais il y a des choses qu'on sait sans savoir.
Adam, donc, était sensé nommer les êtres vivants; puis leur ayant donné un nom, en prendre soin et les cultiver.
Et puis, je ne sais pas ce qui s'est passé (enfin si, tout le monde le sait : la connaissance!), mais la terre lui devint hostile, et il fallut qu'il l'exploite durement pour en tirer quelque chose...
Ensuite il y eut des jungles farouches, mais aussi des déserts. Nos jardins d'origine sont désormais invisibles. En faisant très attention, cependant, on peut voir le jardin dont nous sommes issus et qui nous suit partout comme une fine atmosphère. Ce jardin nous révèle...

Le mois dernier, un ami me montra son jardin. Ce n'était pas vraiment le sien, mais aujourd'hui je sais que ce n'était pas par hasard. C'était un bien triste jardin... Il y avait quelques fleurs, mais généralement artificielles, parsemant des blocs de pierre à quelques mètres au dessus d'ossements humains. Il y avait aussi un tas de petits objets déposés sur les tombes : des jouets, des figurines et des portraits. Et quelque part ailleurs, dans une autre ville, il y avait des gens et une jeune fille en deuil. Au départ, je ne fus pas choquée qu'il m'emmène visiter un cimetière (parce que c'est calme et reposant, un cimetière, et puis ça peut ête beau). Celui ci n'avait rien d'extraordinaire, et ce ne fut qu'après coup que je me rendis compte qu'il s'agissait de son jardin personnel, rempli d'objets inertes.
Il était joyeux, cependant, et d'humeur légère au cours de cette balade. Mais d'une joie déplacée. D'une joie malsaine, même.
Je crois qu'il n'avait pas conscience de ce qu'il me montrait...


Quand j'étais enfant, je passais l'été dans un jardin sur la côté d'azur. Il y avait des fruits qui poussaient sur les arbres. Des figues et des amandes. Au sol, il y avait des tomates et des melons. Les melons avaient poussé tout seuls, dit on, sans qu'on les ait plantés (parce que c'est à cet endroit qu'on avait coutume de jeter les pelures, je crois).

Pour lors, je suis allée faire un tour au Louvre, et j'ai traversé le parc (le jardin des Tuileries). J'ai longé la fontaine. J'ai pensé aux jardins occultes et à mon labyrinthe circulaire. Je ne sais pas si je suis partie du centre et que je me dirige vers des cercles de plus en plus larges et englobants, ou bien si je me dirige vers un point central, au coeur du labyrinthe. On ne sait jamais trop où l'on va.
Je n'aime pas les jardins stériles. Je n'aime pas les jardins d'objets et de miroirs en trompe l'oeil. J'aime les jardins que produisent quelque chose de vivant.

Quelque chose à laquelle on puisse vraiment donner un nom...

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25 avril 2008 5 25 /04 /avril /2008 20:51


Aujourd'hui, voici les paroles d'une chanson passée par de multiples bouches. Fever : un thème qui a beaucoup circulé depuis Little Willie John jusqu'à Madonna, sans oublier Peggy Lee, Ella Fitzgerald, Elvis Presley, The Doors ou Beyonce... Le classique du Rythme & Blues par excellence. Thème cyclique et particulièrement physique.




Pour ma part, cette chanson me fait penser au débat qui fait rage quant aux énergies fossiles et renouvelables, aux biocarburants et aux moteurs hybrides. Pourquoi ça ? Hé bien, parce que la fièvre survient dans un organisme en déséquilibre. En général, en présence d'une infection, laquelle mobilise un surplus de ressources défensives, et entraîne la surchauffe dudit organisme. Certes, on peut avoir la fièvre pour d'autres raisons... Il peut s'agir d'une "surchauffe" de toute autre nature : un excès d'activité, une forte attraction... Evidemment, Fever : la petite rengaine ci dessous, doit être prise sous un angle attractif. Mais il me plait de m'appesantir sur le caractère "combustible" de la chose. En somme, nous sommes tous constitués de poussière, d'eau et de feu. Notre petite machine organique (idéalement réglée à 37°) survit en brûlant de l'oxygène et des aliments journaliers. De même que nos équipements annexes (alimentés quant à eux en essence, piles, courants électriques, etc). En ces temps troublés où nous nous demandons si l'exploitation des sols doit alimenter les moteurs de nos automibles ou l'estomac des populations rendues inutiles par l'avènement de machineries hautement perfectionnées, je vous laisse en musique... 

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FEVER                                                                                                       

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Never know how much I love you                                                                          
Never know how much I care
When you put your arms around me
I get a fever that's so hard to bear
You give me fever (you give me fever) when you kiss me
Fever when you hold me tight (you give me fever)
Fever ... in the mornin'
Fever all through the night

Sun lights up the day time
Moon lights up the night
I light up when you call my name
'cause I know you're gonna treat me right
You give me fever (you give me fever) when you kiss me
Fever when you hold me tight (you give me fever)
Fever ... in the mornin'
Fever all through the night (WOW!!)                       

Everybody's got the fever
That is somethin' you all know
Fever isn't such a new thing
Fever started long time ago

(You give me fever)
Baby, turn on your love light (yeah, yeah)
Let it shine on me (yeah, yeah)
Well, baby, turn on your love light (yeah, yeah)
And let it shine on me (yeah, yeah)
Well, just a little bit higher (yeah, yeah)
And just a little bit brighter, baby (yeah, yeah)
You give me fever (yeah, yeah, yeah, yeah)
You give me fever.

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(Paroles ajoutées par Peggy Lee) :

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Romeo loved Juliet                                                                                       Captain Smith and Pocahontas
Juliet she felt the same                                                                                Had a very mad affair 
When he put his arms around her                                                             When her daddy tried to kill him  
He said, "Julie baby you're my flame"                                                        She said "daddy oh don't you dare
Thou givest fever when we kisseth                                                            He gives me fever with his kisses"
Fever with thy flaming youth                                                                         Fever when he holds me tight"
Fever I'm on fire                                                                                              Fever, I'm his missus" 
Fever yea I burn forsooth                                                                              Daddy won't you trat him right ?"
                                            

Now you've listened to my story 
Here's the point that I have made                                                                            
Cats were born to give chicks fever                                                                          
Be it Fahrenheit or centigrade                                                                             
We give you fever when we kiss you                                                                 
Fever if you live and learn                                                                                                   
Fever till you sizzle                                
What a lovely way to burn...
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